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Intervention de Sarah El Haïry

Séance en hémicycle du vendredi 5 avril 2024 à 9h00
Plan pour l'emploi des seniors après la réforme des retraites et celle de l'assurance chômage

Sarah El Haïry, ministre déléguée chargée de l'enfance, de la jeunesse et des familles :

Depuis 2017, notre action suit un fil rouge : la libération du travail et de l'esprit d'entreprise. La France doit retrouver durablement le chemin de la croissance, et tous ceux qui le peuvent doivent pouvoir trouver un travail qui leur convient, un travail de qualité, porteur de sens et outil d'émancipation, notamment en matière de pouvoir d'achat. Un chômeur qui retrouve un emploi, c'est une respiration pour lui et sa famille.

Le meilleur indicateur de notre santé économique est le taux d'emploi des jeunes et des seniors. Nous avons conduit une action résolue en ce sens : transformation en profondeur du droit du travail, préservation de l'emploi et de l'industrie pendant la crise du covid grâce à l'activité partielle, investissements massifs dans la formation – compte personnel de formation (CPF), plan d'investissement dans les compétences des demandeurs d'emploi, développement historique de l'apprentissage –, valorisation du travail pour qu'il paie mieux – augmentation de la prime d'activité, suppression des cotisations salariales chômage et maladie, prime de partage de la valeur (PPV) dite prime Macron, loi du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, dynamisation des dispositifs d'intéressement et du partage de la valeur.

Les politiques de l'emploi menées par le Gouvernement ont permis d'atteindre des résultats historiques : le taux de chômage, qui s'élevait à 9,6 % au début de 2017, est à son plus bas niveau depuis 2008 : plus de 2 millions d'emplois créés, voilà la réalité. Le plein emploi est à portée de main pour la première fois depuis quinze ans. Atteindre cet objectif est une priorité absolue.

Néanmoins, la situation n'est pas entièrement satisfaisante. Le taux de chômage structurel demeure élevé : 7,5 % au quatrième trimestre 2023, contre 3,1 % en Allemagne. Les difficultés de recrutement n'ont jamais été aussi intenses à court terme, notamment dans les secteurs de la santé, du social, de l'aide à domicile, du transport de voyageurs et de l'industrie. Elles perdureront à moyen terme – les métiers en expansion à l'horizon de 2030 sont déjà en tension. Le taux d'emploi reste encore trop faible, notamment chez les jeunes et les seniors : 32,2 % chez les 15-24 ans, contre 50 % en Allemagne ; 66 % chez les 50-64 ans, contre 78 % en Allemagne.

C'est pourquoi l'amélioration du taux d'emploi des seniors est la priorité du Gouvernement et de la ministre du travail, de la santé et des solidarités. Si le taux d'emploi des seniors n'a cessé de progresser en France depuis les années 2000, il reste très inférieur à la moyenne de l'Union européenne, en particulier pour les 60-64 ans. Or, la mobilisation des seniors dans notre économie est un levier important de croissance et de prospérité. Nos seniors ont du talent et de l'expérience. Il nous appartient de trouver des solutions pour leur permettre de rester en emploi ou de retrouver rapidement un poste.

La réforme des retraites de 2023 a contribué à l'objectif de plein emploi des seniors. Le décalage progressif de l'âge de départ en retraite permettra en effet d'augmenter le taux d'emploi de cette population. L'étude d'impact de la réforme estimait ainsi à 310 000 le nombre d'emplois créés. Ce sont autant de personnes qui, par leur expérience et leur talent, contribueront au bon fonctionnement de notre économie. Les mesures d'accompagnement de la réforme des retraites permettent par ailleurs d'adapter les conditions de travail des seniors. La retraite progressive a été étendue à la fonction publique, et il est plus facile pour les salariés d'y recourir. C'est un bon moyen pour les seniors de préparer leur départ à la retraite en réduisant leur durée de travail.

Le cumul emploi-retraite est désormais créateur de droits, dès lors que la retraite est liquidée à taux plein : cela permet aux seniors de choisir la façon dont ils entendent organiser leur temps, entre travail et retraite. La prévention de l'usure professionnelle a été renforcée, par la création du fonds d'investissement dans la prévention de l'usure professionnelle (Fipu), doté de 1 milliard d'euros sur cinq ans. L'harmonisation du régime social des indemnités de rupture conventionnelle, avant et après l'âge d'ouverture des droits à la retraite, a mis fin à l'incitation pour les entreprises à se séparer de leurs seniors avant l'âge de départ en retraite.

Pour atteindre le plein emploi des seniors, il faudra toutefois aller plus loin et travailler en particulier sur le maintien dans l'emploi des seniors. Il est établi qu'après la perte d'un emploi, les seniors peinent à réintégrer le marché du travail et connaissent plus souvent un chômage de longue durée. Un effort important doit donc être fourni. À cet égard, il faut souligner que 51 % des départs volontaires dans le cadre de ruptures conventionnelles collectives concernent des salariés de 57 ans et plus ; 21 % des salariés sortent du congé de mobilité par un départ en retraite ; un tiers des départs réalisés dans le cadre des plans de départ volontaires concerne les plus de 57 ans.

Nous devons par ailleurs renforcer l'accès des seniors à la formation. Cela passe par la lutte contre des stéréotypes persistants, en conséquence desquels les seniors sont moins souvent orientés vers la formation. Parmi les salariés qui ont utilisé le projet de transition professionnelle, la part des seniors de plus de 50 ans représente à peine 10 %. Pourtant, la formation augmente significativement les chances des seniors de retrouver un emploi.

L'insertion des seniors sur le marché du travail doit être favorisée, lorsqu'ils sont privés d'emploi.

Il convient également d'accentuer la prévention de l'usure professionnelle, ce qui suppose de travailler sur les transitions professionnelles, indispensables pour répondre aux aspirations des personnes à évoluer vers un nouveau métier, pour préparer une deuxième ou une troisième partie de carrière dans des conditions compatibles avec son état de santé et de fatigue, pour réagir aux mutations économiques qui peuvent entraîner le déclin de certaines activités, et pour préparer les compétences nécessaires aux métiers en tension ou d'avenir, notamment dans le cadre des transitions numériques et climatiques.

Il faut enfin mieux lutter contre les stéréotypes et les discriminations liés à l'âge, qui minent encore beaucoup trop notre pays, et assurer la transparence sur les pratiques, notamment par la création d'outils d'autodiagnostic.

Les partenaires sociaux, qui négocient actuellement sur l'ensemble de ces sujets, doivent rendre leurs conclusions lundi prochain. Le Gouvernement en espère une issue positive, qui lui permettra de revenir vers vous avec un projet de loi.

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