Intervention de Édouard Bénard

Séance en hémicycle du vendredi 5 avril 2024 à 9h00
Plan pour l'emploi des seniors après la réforme des retraites et celle de l'assurance chômage

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉdouard Bénard :

Je remercie chacun des intervenants.

Ma question porte sur la segmentation du traitement de la sécurisation des parcours. Plusieurs chercheurs soulignent que les pays qui ont le meilleur taux d'emploi des seniors sont ceux qui présentent les meilleures conditions de travail.

En partant de ce constat, on peut se demander s'il est justifié de traiter les salariés expérimentés ou plus âgés de manière distincte des autres salariés. Ainsi la chercheuse Annie Jolivet écrit-elle : « Si les salariés rencontrent des problèmes liés à leur santé, au temps de travail ou à la pénibilité des tâches, ces difficultés sont présentes à n'importe quel âge. » Cela rejoint d'ailleurs ce que vous venez de dire.

Autrement dit, les difficultés qui s'accentuent en fin de carrière seraient révélatrices de problèmes intrinsèques au marché du travail. Sur ce point, je rejoins les propos de M. Ricordeau. Il est urgent d'essayer de réparer les injustices et les inégalités subies par les travailleurs dits seniors. De même, il est essentiel de défendre les droits en matière de santé au travail – M. Foucard l'a souligné –, ainsi qu'en matière de retraite, de formation ou encore de chômage. Cependant, n'est-ce pas un piège que de traiter les seniors de façon séparée, en segmentant des injustices qui, en réalité, touchent l'ensemble des travailleurs, parce qu'elles sont causées par les modalités mêmes de fonctionnement du marché du travail ?

Concentrons-nous sur la formation. Selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), 12,6 % des seniors ont accès à la formation en France, contre 28 % en Allemagne, soit plus du double. En outre, il existe de fortes disparités selon le niveau de diplôme et le type d'emploi occupé. Selon le Céreq – Centre d'études et de recherches sur les qualifications –, deux fois plus de cadres et de salariés occupant une profession intellectuelle supérieure bénéficient d'un accès à la formation que les ouvriers, alors que le taux d'emploi des cadres âgés de 60 à 64 ans est deux fois supérieur à celui des ouvriers du même âge.

En d'autres termes, les salariés qui ont le plus besoin d'accéder à des opportunités professionnelles en acquérant de nouvelles compétences sont aussi ceux qui accèdent le moins à la formation.

L'urgence commande de corriger ces inégalités, à condition de ne pas perdre la bataille sur le long terme. Cette bataille est celle d'un droit à la formation choisi, pour tous, tout au long de la vie – pas seulement en fin de carrière, quand il est presque trop tard pour évoluer ou se réorienter.

Je souhaite connaître votre opinion sur le sujet, même si vous n'avez que deux minutes pour me répondre, ce qui est assez frustrant.

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