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Intervention de Thierry Malbert

Séance en hémicycle du vendredi 5 avril 2024 à 9h00
Place dans la société et dans le droit des familles monoparentales

Thierry Malbert, professeur des universités :

Je ne tiens pas de réponse toute prête à votre disposition, mais notre présence a justement pour objectif d'y réfléchir. Il est évident que les territoires d'outre-mer, où le nombre de familles monoparentales explose depuis dix ou quinze ans, présentent des spécificités. On constate un processus de matrifocalité forte, lié au passé d'une société esclavagiste et à l'ancienne économie de plantation de ces territoires, héritages auxquels se superpose la modernité des outre-mer.

Outre-mer, les parents isolés se tournent rarement vers le réseau de soutien aux compétences parentales. Dès lors se posent plusieurs questions : comment travailler sur le vécu de ces parents et le conforter ? Comment parentaliser ? Comment déstigmatiser la monoparentalité de mères qui, plus souvent qu'en métropole, ont été des jeunes filles aux grossesses précoces entrant dans la maternalité par une situation individuelle ? Il importe donc de dépasser le stigmate, pour conforter et accompagner les mamans solos.

Pour celles qui travaillent, nous préconisons, en outre-mer comme dans l'Hexagone, l'adaptabilité à la fonction au travail : il faut tenir compte du « travailleur-parent », si j'ose dire. Les travailleurs du secteur privé et du secteur public sont parfois parents, mais la fonction parentale ne prime pas sur la fonction laborieuse. Or l'adaptation des horaires de travail et la création de crèches seraient utiles : de telles mesures, déjà applicables aux PME – petites et moyennes entreprises – et aux PMI – petites et moyennes industries –, pourraient être étendues aux microsociétés, fréquentes dans les territoires d'outre-mer. Il s'agit en tout cas de mieux penser le travailleur-parent ou le parent-travailleur, de ne pas négliger cette double composante, quelle que soit la manière dont elle est articulée.

S'agissant toujours de l'outre-mer, nous ne sommes pas là pour formuler des injonctions face à des évolutions sociétales – pour dire « stop, il ne faut plus de monoparentalité » –, mais pour envisager son accompagnement, en tenant par exemple compte des difficultés que suppose le handicap. Selon moi, l'enjeu est la confiance : comment faire en sorte que les mamans solos et les papas solos, qui sont de plus en plus nombreux du fait de la généralisation de la garde alternée, s'épanouissent, jouissent d'une liberté d'accompagner leurs enfants, d'une liberté familiale et d'une liberté individuelle et retrouvent un cadre ?

On trouve aussi dans les espaces ultramarins beaucoup de violences intrafamiliales, il faut le reconnaître. Or les mamans solos, surtout lorsqu'elles sont jeunes, affirment préférer poursuivre leur vie seules que mal accompagnées, pour se protéger de ce type de violences.

Ainsi, les différentes dimensions de la monoparentalité sont liées et nous devons toutes les accompagner, les prendre globalement en compte, afin qu'il y ait davantage d'êtres épanouis.

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