Intervention de Catherine Vautrin

Séance en hémicycle du mercredi 3 avril 2024 à 21h30
Bilan des réformes de l'assurance chômage depuis 2017

Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités :

Évoquer le bilan des réformes de l'assurance chômage depuis 2017, c'est rappeler que le bilan de notre action est guidé par un fil rouge : libérer le travail et l'esprit d'entreprise.

La France doit retrouver durablement le chemin de la croissance. Notre objectif est que tous ceux qui le peuvent puissent retrouver un travail qui leur convient, un travail de qualité, porteur de sens et d'émancipation. En effet, le travail est le meilleur outil d'émancipation, notamment en termes de pouvoir d'achat.

Quand un chômeur retrouve un emploi, c'est aussi une respiration pour nos comptes sociaux. Le meilleur indicateur de notre santé économique est le taux d'emploi global, bien sûr, mais aussi le taux d'emploi des jeunes et celui des seniors.

La majorité a mené une action résolue en ce sens. Je pense à la transformation en profondeur de notre droit du travail ; à la préservation de l'emploi et de l'industrie pendant la crise du covid, en particulier grâce à l'activité partielle ; à l'investissement massif dans la formation – compte personnel de formation, plan d'investissement dans les compétences des demandeurs d'emploi, développement historique de l'apprentissage ; et, enfin, à la volonté de valorisation du travail, afin qu'il soit plus rémunérateur.

L'amélioration de notre système d'assurance chômage a été au cœur des efforts. Avec la réforme de l'assurance chômage de 2019, l'objectif était de mieux encourager à la reprise d'un emploi. Permettez-moi de citer le bonus-malus appliqué à la cotisation employeur, qui a permis d'encourager les entreprises les plus utilisatrices de contrats courts à réduire leurs roulements de main-d'œuvre.

De plus, le mode de calcul de l'indemnité chômage a été revu, afin de ne pas encourager l'alternance de contrats courts et de périodes de chômage. Pour avoir droit à une indemnisation, il faut désormais avoir travaillé six mois au cours des vingt-quatre derniers mois alors qu'auparavant, il fallait avoir travaillé quatre mois sur une période de vingt-huit mois.

La situation financière du régime a été assainie : déficitaire hier, l'assurance chômage est aujourd'hui excédentaire, de 3,6 milliards d'euros en 2023. Notre objectif est de continuer sur cette trajectoire.

Les estimations de l'effet de cette réforme sur la reprise d'emploi sont positives. La réforme de 2019 a aussi permis de faire en sorte que le travail paye mieux que l'inactivité : pour les salaires supérieurs à 4 500 euros bruts par mois, l'allocation baisse de 30 % à partir du septième mois.

Depuis le 1er février 2023, l'assurance chômage est aussi plus incitative à la reprise d'emploi. Elle est plus stricte quand trop d'emplois sont non pourvus – on en compte 340 000 aujourd'hui.

Le déploiement de France Travail, financé en partie par les excédents de l'assurance chômage, permet d'accélérer le retour vers l'emploi, avec l'instauration de droits et de devoirs, d'un accompagnement renforcé des bénéficiaires du RSA, assorti de mesures de suivi et de contrôle.

C'est une logique d'investissement social. Il est important de rappeler qu'une personne indemnisée par l'assurance chômage coûte en moyenne 23 200 euros, une personne au RSA, 13 600 euros. L'objectif est de les accompagner afin que l'une et l'autre retournent vers l'emploi.

Il y a des résultats : le taux de chômage, qui était de 9,6 % début 2017, est à son niveau le plus bas depuis 2008 ; plus de deux millions d'emplois ont été créés. Bien que la situation économique se soit dégradée depuis le second semestre 2023, on peut toujours considérer qu'il est possible d'atteindre le plein emploi d'ici la fin du quinquennat, pour la première fois en quinze ans. Atteindre cet objectif est une priorité absolue.

Il faut donc faire plus. On le sait, le taux de chômage structurel reste élevé en France. Au quatrième trimestre 2023, il s'élevait à 7,5 %, contre 3,1 % en Allemagne. Des difficultés de recrutement se font déjà ressentir dans la santé, le social, les aides à domicile, le transport de voyageurs, mais aussi certains secteurs industriels ; les métiers qui devraient connaître une expansion à l'horizon 2030 se trouvent dès maintenant en tension.

Le taux d'emploi reste particulièrement bas chez les jeunes : il est de 32,2 % en France, contre 50 % en Allemagne. Chez les seniors – 50 ans à 64 ans –, il est de 66 %, contre 78 % en Allemagne. La part des jeunes âgés de 15 ans à 29 ans ni en emploi ni en formation est trop importante : elle est de 11,9 %, contre 8,2 % en Allemagne.

Notre pays a longtemps subi le chômage de masse et, les études le prouvent, plus on passe de temps au chômage, plus il est difficile de retrouver un emploi.

Permettez-moi de rappeler les priorités annoncées par le Premier ministre. La première est de poursuivre la réforme de l'assurance chômage. Notre système d'indemnisation du chômage, qui fait l'objet d'un décret de jointure jusqu'en 2024, peut être tourné davantage encore vers la reprise d'emploi. Il reviendra aux partenaires sociaux d'élaborer de nouvelles règles. Du fait de la dégradation de la situation économique, il est probable qu'une nouvelle lettre de cadrage leur sera envoyée, leur demandant d'identifier des pistes de réforme qui incitent au retour rapide à l'emploi. Le Premier ministre a évoqué trois leviers possibles : réduire la durée d'indemnisation ; modifier les règles d'ouverture des droits ; réduire les montants d'indemnisation – cette dernière option n'a pas notre préférence. Ne nous empêchons pas d'être créatifs, d'échanger avec les partenaires sociaux et d'examiner toutes les pistes possibles. L'objectif est le retour rapide en emploi.

Deuxième priorité, nous devons continuer d'investir massivement dans la formation. La productivité, qui décroche en part relative par rapport à l'Allemagne et aux États-Unis depuis les années 2000, doit être améliorée. La formation des demandeurs d'emploi, des salariés, des jeunes et des seniors doit faire l'objet d'investissements importants et durables. Cela passe par l'apprentissage – l'objectif est de 1 million d'apprentis en 2027 –, par la réforme des lycées professionnels et par l'amélioration de notre système de formation, qui doit faciliter les transitions professionnelles. Les personnes qui travaillent doivent pouvoir valoriser l'expérience qu'ils ont acquise en situation de travail – les salariés croient souvent qu'ils ne peuvent acquérir des diplômes que par la formation continue.

Améliorer l'accompagnement vers l'insertion professionnelle constitue une autre priorité. Avec France Travail, nous devons renforcer l'accompagnement des bénéficiaires du RSA. Nous devons aussi répondre très concrètement aux difficultés rencontrées par nos concitoyens en matière d'accès aux transports, au logement et à la garde d'enfants, qui constituent des freins majeurs au retour à l'emploi.

Enfin, nous devons continuer à faire en sorte que le travail paye mieux. La semaine dernière, j'ai installé le Haut Conseil des rémunérations, de l'emploi et de la productivité. Il faut stimuler encore les négociations sur les salaires dans les branches professionnelles. Nous avons demandé aux partenaires sociaux de négocier rapidement sur les questions de partage de la valeur, afin de trouver le bon équilibre entre rémunération du capital et rémunération du travail. Enfin, nous devons trouver de nouveaux modes d'action pour lutter contre le travail à temps partiel subi, source de précarité.

Il faut redonner du sens au travail. Hier, j'évoquais avec les partenaires sociaux les assises du travail, mises en place dans le cadre du Conseil national de la refondation (CNR), que nous réunirons avant l'été. Il s'agit de mener ensemble des réflexions sur le rapport au travail, son organisation – télétravail, nouvelles formes d'emploi, démocratie au travail, mise en place du compte épargne temps universel.

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