Madame la ministre du travail, de la santé et des solidarités, la société est prête ; l'êtes-vous ? Alors que 7 millions de femmes et de personnes menstruées souffrent de règles douloureuses, que 2,5 millions de femmes sont atteintes d'endométriose et que 66 % des femmes salariées souhaiteraient bénéficier de l'arrêt menstruel, êtes-vous prête à agir pour que le monde du travail cesse enfin d'imposer aux salariées de souffrir en silence ?
Car avoir des règles incapacitantes au travail, c'est s'exposer à une double peine : celle de travailler dans la souffrance ou celle de s'arrêter en subissant le délai de carence que vous imposez dans pareil cas. À cause de cette double peine, les personnes concernées peuvent perdre jusqu'à 10 % de leur salaire chaque mois et 25 % des personnes atteintes d'endométriose sont forcées de renoncer à leur carrière. Ces jours de carence sont une véritable punition financière, encourue pour le simple fait d'être une femme et d'avoir des douleurs menstruelles, ces mêmes douleurs qu'ont pu expérimenter certains députés de votre majorité la semaine dernière. Le régime de l'affection de longue durée (ALD) n'est pas non plus une réponse à la hauteur, puisqu'il ne concerne que 0,005 % des personnes atteintes d'endométriose, lesquelles subissent jusqu'à dix ans d'errance médicale.
Les premières discriminations, ce sont celles subies par les femmes, parce que les règles sont encore un tabou dans le monde du travail et parce que le régime actuel est incapable de prendre en compte le caractère cyclique des menstruations ou les autres maladies gynécologiques telles que le fibrome ou le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK).
Alors êtes-vous prête à instaurer un arrêt menstruel sans jour de carence, ce qui serait un signe fort de votre engagement à faire enfin de la santé menstruelle un enjeu de santé publique et de solidarité nationale ? L'Espagne, mais aussi les villes de Lyon, de Strasbourg ou de Saint-Ouen, ainsi que les entreprises Carrefour, L'Oréal ou Louis Design ont franchi le pas. L'entrée récente du droit à l'interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la Constitution a montré que nos institutions pouvaient évoluer avec leur temps. La société est prête, alors qu'attendez-vous ?