Comme mon collègue Léo Walter, je suis touché par votre témoignage, madame Judith Godrèche, et un peu gêné : adolescent, puis jeune adulte – j'ai presque le même âge que vous – j'ai beaucoup aimé les films dans lesquels vous jouiez. Vos révélations ont été une sorte de cataclysme, laissant comme une blessure, une incompréhension : se dire que ces films qu'on a aimés, croyant en toute innocence voir des œuvres de cinéma, n'étaient pas que cela pour vous, c'est assez terrible. Vous êtes d'un courage absolu, vous n'êtes pas la première : Adèle Haenel avait également eu des mots forts pour dénoncer certaines choses, nous étions en 2019. Nous voilà en 2024, rien ne semble avoir vraiment bougé dans le milieu du cinéma. Autant les révélations liées au mouvement international #MeToo paraissent avoir provoqué une prise de conscience dans d'autres pays, notamment aux États-Unis, autant le monde du cinéma français me donne l'impression d'être resté au milieu du gué.
Organiser une commission d'enquête serait bien sûr nécessaire : elle nous révélerait certains problèmes. Mais nous pouvons d'ores et déjà travailler sur plusieurs points : le droit des enfants dans le cinéma doit être revu de la cave au grenier. Normalement, il y a des règles. Pourquoi sont-elles insuffisantes ? Comment se fait-il que les enfants ne soient pas accompagnés ? Qu'un enfant se retrouve seul avec un adulte me paraît complètement saugrenu. Un tel cas de figure n'est pas censé être possible et ne devrait plus l'être ! Il faut donc que nous légiférions vite à ce sujet, notamment pour donner un statut aux agences de casting pour enfants, qui doivent évidemment avoir une licence ; encadrer le métier de directeur de casting, en imposant des règles, une obligation de formation et de qualification me semble également important.