Le savoir vernaculaire est en effet complémentaire du savoir scientifique, même lorsque l'on travaille sur des aléas naturels.
J'ai par exemple travaillé avec un collègue sur les submersions marines en essayant d'identifier des évènements passés, notamment lorsqu'ils ont laissé un legs sédimentaire particulier – avec un amas de blocs rocheux coralliens que l'on trouve sur les platiers et qui sert parfois d'amer pour les navigateurs. Un certain nombre de champs de blocs de corail ont été identifiés sur l'île de Vanua Levu, au nord des Fidji, mais on ne savait pas s'ils résultaient d'un tsunami ou d'un cyclone. Nous avons mené une enquête sur la toponymie avec des étudiants locaux et le nom qui avait été donné par la mémoire collective à l'un de ces champs était « les pierres des grands vents », ce qui indique qu'un cyclone en était à l'origine. Les enquêtes de terrain auprès de la population et les savoirs vernaculaires sont bien intégrés à nos recherches et permettent parfois de confirmer des hypothèses scientifiques.
J'ai effectivement évoqué le problème de l'indemnisation dans le cadre des PPRN en Polynésie française. C'est une question particulière, liée au droit polynésien – la Polynésie est un pays d'outre-mer qui a ses propres lois et sa propre assemblée. Il y a certes des points communs avec les PPRN en métropole ou dans les autres collectivités d'outre-mer : si un PPRN impose une servitude, cela ne donne pas lieu à indemnisation. Mais la différence réside dans le fait qu'il n'y a pas d'indemnisation en cas d'expropriation du fait d'une exposition à des risques majeurs naturels. C'est un problème. Le fonds Barnier, qui pourrait servir à financer ces indemnisations, n'est pas mobilisé en Polynésie française.
À la suite d'une saison cyclonique 1982-1983 avec des dégâts humains et sur les infrastructures particulièrement catastrophiques, un fonds spécial territorial a été créé. Il repose sur une forme de solidarité territoriale mais ne comporte pas de mécanisme assurantiel. Sur les limites du PPRN en Polynésie française, je vous renvoie au rapport d'information n° 122 sur les risques naturels majeurs dans les outre-mer, publié par le Sénat le 14 novembre 2019.