J'ajouterai que la relation civilo-militaire est très fluide. Lors du dernier passage d'un cyclone, dès que l'on a senti qu'il pouvait toucher les îles, un dialogue très informel s'est établi entre le préfet et moi, par téléphone ou par la messagerie WhatsApp, pour évaluer la situation. J'ai déployé des moyens sans attendre de réquisition du préfet, parce que j'avais mes propres contraintes – disponibilité des avions, possibilité de se poser à Saint-Martin... Un cadre est décrit dans l'instruction mais, dans la réalité, les choses sont plus souples, plus fluides. Cela permet d'être très réactif. C'est d'ailleurs la force des armées.
Si Irma est la catastrophe de référence, il faut rappeler que les ouragans José et Maria, de catégorie 4 et 5, sont passés dans les jours qui ont suivi Irma. C'est le modèle de l'engagement : sept semaines, 1 700 militaires, un bâtiment amphibie venu de métropole, deux avions A400M, deux avions Casa, sept hélicoptères de manœuvre, des avions de patrouille maritime, des centaines, voire des milliers de tonnes de nourriture distribuées.
Cela nous a permis de mettre en évidence certaines faiblesses logistiques en Guadeloupe. Ce n'est pas une surprise : les décisions prises à partir de 2012 y ont pratiquement conduit à la fermeture de notre emprise aérienne. Quand nous avons voulu utiliser ces sites pour faire des manœuvres logistiques, ils n'étaient plus totalement disponibles. Ce problème ayant été identifié, nous préparons la recréation d'un pôle aéronautique en Guadeloupe.
Cela a également mis en évidence le besoin de préidentifier des renforts – plus d'une centaine de personnes ainsi que des moyens précis – lorsque débute la période cyclonique.
Autre point notable, les infrastructures portuaires à Saint-Martin étaient inaccessibles. Il a donc fallu utiliser des moyens amphibies pour intervenir, déployer les moyens de déblaiement ainsi que les troupes. Or nous n'avons pas de moyens amphibies : ils sont en métropole. À la suite du désarmement du dernier des bâtiments de transport léger (Batral), je suis dans l'incapacité de mener une petite opération amphibie de débarquement de troupes ou de matériel. En raison de cette lacune, nous dépendons de la métropole.