J'ai appartenu à la Cour des comptes, comme le président Bourlanges, mais j'ai une passion pour les affaires internationales, auxquelles j'ai consacré les plus belles années de ma vie. Je devrais normalement me féliciter de cette réforme, ayant toujours senti au Quai d'Orsay que je n'étais pas tout à fait de la maison, même si j'y ai un grand nombre d'amis.
Cependant, je ne pense pas qu'il s'agisse d'une bonne réforme. Je crois que le métier de diplomate correspond à une certaine spécialité, qui se consolide au fil des années. Pour ma part, j'ai débuté ma carrière de diplomate en tant que membre du centre d'analyse et de prévision, puis poursuivi comme conseiller culturel aux États-Unis, avant de revenir plus tard à la tête du centre d'analyse et de prévision. Ma carrière a donc été jalonnée d'étapes, au cours desquelles j'ai appris. Il me semble donc dangereux de parachuter des personnes à des postes diplomatiques importants sans qu'ils aient au préalable connu de telles étapes.
À ce titre, le risque de politisation que vous évoquez est réel. J'estime pour ma part qu'il est pertinent de disposer d'un corps diplomatique qui respire, en faisant appel à des personnes qui ne sont pas des diplomates de carrière, mais de façon limitée. Il faut à la fois protéger la spécialité diplomatique tout en parvenant à l'ouvrir à un certain nombre de domaines nouveaux, comme l'économie des données précédemment évoquée, dont un diplomate n'est pas forcément spécialiste. Je perçois bien l'intérêt d'ouvrir les fenêtres mais je ne pense pas qu'il faille les ouvrir au point d'affaiblir la diplomatie en tant qu'institution professionnelle.