Nous assistons effectivement à une modification du climat international. Au début des années 2000, le marché était roi et la répartition de la production était la règle pour accroître l'efficacité économique. Selon « l'Évangile de Davos », l'entreprise privée pouvait sauver le monde. Vingt ans plus tard, les entreprises d'État – chinoises ou autres – triomphent et le protectionnisme a repris ses droits, souvent sous la forme d'une politique industrielle. Ceci vaut particulièrement pour les États-Unis. Le mercantilisme a beaucoup progressé et nous nous retrouvons dans un environnement très différent.
Dans ces circonstances, l'Europe, qui s'est fondée sur ces principes de libre-échange et de confiance dans le système international, doit réviser assez drastiquement sa copie. Ce cheminement prend du temps mais il est en cours.
Au-delà, le risque concerne un retour éventuel au monde de l'entre-deux-guerres, de la même façon que la fermeture commerciale et le rapatriement de la production avaient suivi la première guerre mondiale, laquelle avait marqué l'apogée de la première globalisation. Nous pourrions assister au même phénomène, lequel comporte des effets très négatifs en termes géopolitiques, c'est-à-dire l'accentuation des rivalités et, potentiellement, des guerres pour la maîtrise des ressources.
Nous avons précisément créé le Forum de Paris sur la paix pour acter la disparition de cet « esprit de Davos ». Pour répondre aux défis globaux, nous avons besoin de faire travailler l'ensemble des acteurs et d'adopter une démarche où l'intérêt général est bien plus défendu que celui du marché.