« Toute ma vie, j'ai eu deux emplois : la journée, sur le chantier ; le soir, dans le camion pour secourir. Cette pénibilité, elle n'est jamais prise en compte. »
On peut les croiser dans les rayons d'un supermarché, dans une usine, au volant d'un camion benne de la commune, dans les espaces verts de Peyrat-le-Château, ou derrière un bureau. Mais quand le devoir les appelle, ils quittent le boulot. Parfois, lorsqu'ils sont en congés, ils renoncent à leur repos. Ils arrêtent tout, filent à la caserne, enfilent leur tenue, et courent porter secours. Il s'agit des sapeurs-pompiers volontaires, qui représentent 80 % des pompiers du pays.
On fait appel à ces héros de tous les jours, qui, en plus de servir le pays en exerçant leur emploi, s'engagent comme pompiers volontaires. Sans eux, notre système de sécurité civile s'effondrerait. Que ce soit en cas d'inondation ou de malaise, ils répondent présents.
Ce week-end, à Bellac, à Magnac ou à Aixe-sur-Vienne, ils étaient présents pour faire face à d'immenses inondations. Ce week-end, en Haute-Vienne, on a dénombré 123 interventions de pompiers, 96 engins mobilisés par le service départemental d'incendie et de secours (Sdis), 43 personnes mises en sécurité, grâce à l'intervention de 253 sapeurs-pompiers, parmi lesquels plus de la moitié étaient des volontaires.
Humbles, ils ne demandent pas grand-chose. Ils sont engagés pour le bien commun. Mais s'ils viennent à manquer, c'est la sécurité des Français qui sera en danger. Certains chiffres doivent nous alerter : entre 2004 et 2020, le nombre d'interventions a augmenté de 20 %. Or le problème est que, pendant la même période, le nombre de pompiers a diminué de 2 % en raison, notamment, d'une baisse des effectifs des pompiers volontaires.
Le second problème est que 30 à 40 % des pompiers volontaires ne souhaitent pas renouveler leur engagement au bout de cinq ans ; on assiste à une crise. Or entre l'asphyxie de l'hôpital public, les Jeux olympiques et le réchauffement climatique, les sollicitations des sapeurs-pompiers ne manqueront pas.
Selon la Fédération nationale des sapeurs-pompiers, 50 000 pompiers volontaires supplémentaires seraient nécessaires en 2027. À rebours des évolutions en cours, nous avons donc besoin de davantage de volontaires. Il n'y a pas de recette miracle. Pour conserver des volontaires ou en attirer, nous devons reconnaître la loyauté, le service, mais aussi la pénibilité de l'engagement ; la bravoure, l'engagement pour la société, mais aussi le dos usé et les articulations fragilisées. Nous devons leur assurer une retraite en bonne santé.
Pour cela, j'ai déposé une proposition de loi visant à octroyer aux pompiers volontaires qui justifient de dix années d'engagement une bonification de trois trimestres, pour partir plus tôt à la retraite. Je ne suis pas le premier : il y a un consensus sur le sujet, à gauche comme à droite, à tel point que dans la dernière réforme des retraites, les sénateurs ont adopté un amendement pour valoriser l'engagement et compenser la pénibilité.
Je crains que le Gouvernement n'enfume les pompiers : alors que les trois trimestres devaient concerner tous les pompiers volontaires pouvant se prévaloir de dix ans d'engagement, le Gouvernement s'apprête à ne les donner qu'aux pompiers qui ont eu des périodes de chômage – à un nombre très limité donc. Ce n'est pas du tout ce que les volontaires, les syndicats et les élus demandaient, ni la philosophie de la loi. Cette fausse bonne nouvelle déçoit gravement les pompiers. Monsieur le ministre, le Gouvernement doit revoir sa copie et accorder à tous les pompiers volontaires ayant dix ans d'engagement la possibilité de partir à la retraite plus tôt et en bonne santé.