Deuxième acteur mondial de l'industrie ferroviaire, le groupe Alstom est dans le rouge. Confrontée à un problème de trésorerie, sa direction se contente d'annoncer une cession d'actifs et la suppression de 1 500 emplois dans le monde, dont 298 en France. Une nouvelle fois, des salariés considérés comme des variables d'ajustement, paient les erreurs de leurs dirigeants. Des erreurs, ces derniers ne manquent pas d'en faire, raison pour laquelle j'alerte le Gouvernement : ce fleuron industriel, essentiel à la réussite de la transition énergétique en France, est à la dérive.
Des erreurs passées ont d'abord aggravé le déficit de trésorerie d'Alstom : en 2019, 1,3 milliard d'euros de dividendes ont été versés à ses actionnaires, alors que le groupe s'apprêtait à racheter Bombardier pour 5,5 milliards.
Mais c'est surtout la délocalisation de productions à l'étranger qui est en cause. L'hyperexternalisation de la production – au point qu'Alstom semble être devenu un simple assemblier – est à l'origine de retards d'approvisionnement et de multiples défauts de qualité, qui allongent considérablement les délais de livraison d'Alstom. La conception des trains est aujourd'hui réalisée en Inde : aberrante au plan écologique, l'externalisation à outrance s'avère désastreuse au plan industriel, tant les malfaçons et les problèmes d'ingénierie affectent la production. Les retards de paiement qu'elle provoque grèvent toujours plus la trésorerie de l'entreprise.
En tant qu'actionnaire, l'État doit agir et rectifier le tir. Ce n'est d'ailleurs pas d'une cure d'amaigrissement dont Alstom a besoin, mais bien plutôt d'une cure d'investissement. Par exemple, le groupe devrait réinvestir dans les cabines de peinture de ses sites plutôt que de sous-traiter ces opérations ; il devrait relocaliser sa production de câbles électriques plutôt que de les importer de ses usines du Maroc ou de Pologne et de devoir les retoucher dans les usines du Valenciennois. Quant aux essieux et aux roues, ils devraient être fournis à 100 % par l'entreprise MG Valdunes, qui vient de trouver un repreneur. Des propositions de ce type, nous en avons plein en magasin !
Ce que nous demandons à l'État, c'est d'agir pour que le groupe Alstom, au lieu de dégraisser, investisse pour produire en France, former des salariés, abaisser le coût carbone des trains et des wagons – nous voulons des rames bas carbone et made in France ! C'est le rôle de l'État que d'assigner de tels objectifs à un groupe industriel stratégique comme Alstom. Il peut lui donner les moyens de les atteindre, par exemple en lui accordant des prêts garantis, conditionnés à la mise en œuvre de cette stratégie.