Plus de soixante ans se sont écoulés depuis le massacre du 17 octobre 1961 et, pourtant, le souvenir de cette journée reste gravé dans la mémoire collective. Aujourd'hui encore, le travail de mémoire se poursuit pour tenter de mettre des noms et des visages sur ces disparus longtemps ignorés, alors que la plaie des familles n'a jamais entièrement guéri.
Rappelons que le 17 octobre des milliers d'Algériens, réunis dans un élan pacifique contre un couvre-feu discriminatoire, ont été brutalement réprimés. Des vies ont été fauchées et des familles endeuillées. Pourtant, pendant des décennies, un voile d'omission a tenté de couvrir l'ampleur de cette tragédie pour des centaines de familles, tragédie qui a causé bien plus que les trois morts initialement reconnues par les autorités. Il aura fallu attendre des décennies avant que la vérité émerge, grâce à la persévérance de ceux qui ont refusé l'oubli.
Il aura fallu du courage politique, aussi, en particulier celui de notre ancien collègue Philippe Guillemard. Sa détermination pour que cette proposition de résolution ne soit pas oubliée mérite d'être saluée. Son engagement, qui l'a conduit à vérifier l'accessibilité des archives aux côtés de la députée Sebaihi, témoigne de la volonté du groupe Renaissance de faire face à l'histoire de la France, même dans ses pages les plus sombres. Cette initiative s'inscrit dans le sillage des actions audacieuses de réconciliation engagées par le Président de la République.
Le 16 octobre 2021, dans une démarche sans précédent sous la V
Dans cette perspective, la présente proposition de résolution ne se veut pas seulement un acte de reconnaissance – et je tiens ici à rendre hommage aux victimes et à leurs familles. Elle ambitionne de tisser un lien entre nos mémoires, de revisiter notre histoire commune avec l'Algérie, sous le prisme de l'entente et de la coexistence harmonieuse promue par la déclaration d'Alger signée le 27 août 2022. À ce titre, la poursuite des travaux de la commission mixte franco-algérienne d'historiens, instituée par ladite déclaration, est essentielle tant elle permet d'entretenir une compréhension partagée et approfondie de notre histoire commune.
En appelant à l'inscription d'une journée de commémoration du massacre à l'agenda des journées et des cérémonies officielles, cette proposition de résolution conforte les commémorations déjà organisées par plusieurs villes d'Île-de-France. Elle vise à accorder à cet événement, longtemps occulté ou mal interprété, la place distincte qu'il mérite dans notre récit national.
Chacun a vis-à-vis de cette histoire une déchirure personnelle, voire intime. Certains ici pourraient préférer une narration idéalisée de notre passé, une version dénuée de toute zone d'ombre. Il est essentiel de reconnaître la complexité de notre récit national, car il est tissé à la fois de victoires et de périodes douloureuses. Passer sous silence ou idéaliser notre passé ne sert ni la vérité ni notre engagement envers le peuple que nous représentons.
En nous engageant dans cette voie, nous ne cherchons pas seulement à honorer la mémoire des victimes, nous aspirons à tisser un avenir commun, guidé par la compréhension mutuelle et le respect. Cette initiative trouve un écho tout particulier chez nos concitoyens binationaux, qui incarnent le lien vivant de cette histoire commune. Pour eux, comme pour nous tous, reconnaître ces événements est une étape essentielle vers la réconciliation et l'édification d'une société unie.
C'est dans cet esprit d'apaisement que notre groupe votera en faveur de votre proposition de résolution. Non pour raviver d'anciennes douleurs, mais pour bâtir des ponts entre les deux rives de la Méditerranée, pour construire un avenir partagé.