Nous avons l'habitude de définir la crise à partir de l'accident. Néanmoins, la crise ne se confond pas avec l'urgence. L'urgence implique de mobiliser très rapidement des moyens pour faire face à une situation connue, empreinte d'une légère incertitude : il s'agit d'alerter, de mobiliser et de coordonner au mieux dans cet environnement.
Pour sa part, la crise survient lorsqu'il y a une destruction des références : les paradigmes habituels et les hypothèses appliquées en temps normal n'opèrent plus. Nous sommes obligés de passer d'un univers de réponses à un univers de questions. Comme le précisait un ministre américain de la santé en 1976 à propos de l'épidémie de grippe porcine : « Ce n'est pas que nous n'avions pas les réponses : nous n'avions pas les questions que nous aurions dû nous poser. »
Pour les décideurs, l'enjeu est bien de parvenir à passer d'un univers de réponses à un univers de questions très complexes. Cela implique deux exigences : l'excellence dans le connu, d'une part, et l'inventivité dans l'inconnu, d'autre part. Si la société est plutôt bien préparée aux grandes urgences, elle est très mal préparée à l'environnement de crise. Il est primordial de bien comprendre que nous sommes désormais confrontés à des scénarios de surprise de haute intensité, qui sont d'une nature radicalement différente des risques auxquels nous avions à faire face jusqu'alors.