Intervention de André Chassaigne

Réunion du lundi 4 mars 2024 à 21h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Notre modèle dual de sûreté nucléaire est le fruit d'un compromis construit depuis le lancement du plan Messmer ; il a fait ses preuves. Il repose sur la séparation des activités de contrôle de la sûreté nucléaire et des missions d'expertise et de recherche, séparation qui permet la conjugaison des compétences, un dialogue, une capacité de diagnostic particulièrement efficace pour assurer la sûreté des sites existants, ainsi que la protection des populations. Il en résulte un haut niveau de confiance de nos concitoyens puisque plus d'un Français sur deux – 56 % – jugent le contrôle de la sûreté des centrales nucléaires efficace, niveau qui n'avait pas été atteint depuis 2014.

Pourquoi venir bousculer une organisation qui fonctionne et que ses acteurs souhaitent préserver ? Pourquoi prendre le risque d'entamer la confiance de nos concitoyens dans la sûreté nucléaire à l'heure de la relance de la filière ? Avec la fusion, nous portons le risque de voir se réduire le champ de l'expertise, dans un contexte de réduction continue des moyens de l'IRSN depuis dix ans, ainsi que le risque de faire fuir de nombreux salariés de l'IRSN dont les conditions et les perspectives d'emploi seront dégradées. Les organisations syndicales sont unanimes : elles pointent toutes le risque de désorganisation. Elles estiment en effet que si la relance de la filière nucléaire est une impérieuse nécessité, elle doit être assortie du maintien de la séparation entre les activités de contrôle et d'expertise.

Chacun conviendra que nous ne pourrons réussir la relance du nucléaire sans des moyens financiers et humains renouvelés. Or les moyens humains présents à ce jour ne sont pas adaptés à cette perspective, qu'il s'agisse de formation, de spécialité, d'école des métiers, dans la formation initiale au sein d'éducation nationale, dans le domaine de la recherche au CEA, au CNRS, dans les universités. Ils manquent également à l'ASN et à l'IRSN, ainsi que chez les exploitants. En matière de sûreté, ces moyens sont aussi ceux de l'indépendance. Quelle réponse, dans cette réforme ? Quels moyens nouveaux ? Quel est au contraire son coût au regard des pertes d'activité et de partenariat ?

Compte tenu des orientations budgétaires récentes et des lourdes incertitudes sur le devenir de la nouvelle entité que vous appelez de vos vœux, nous sommes plus que circonspects sur l'adéquation entre votre projet et les attentes des salariés comme de nos concitoyens. Vous l'aurez compris : nous continuerons à nous opposer fermement à cette fusion.

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