Chers collègues de la majorité, vous nous proposez d'examiner une réforme de la gouvernance de la sûreté nucléaire alors même que le Parlement a déjà dit non à un tel projet et confirmé les principes régissant notre modèle. Vous continuez à vouloir faire exploser un système qui marche, sans aucune justification, avec une légèreté et une irresponsabilité sans pareilles. Cette méthode cavalière tranche avec tous les bons principes en matière de sûreté nucléaire, rappelés par les instances internationales : transparence, stabilité, sécurité.
Votre réforme est une folie inutile et dangereuse. Tel est le constat que partagent, de façon quasi unanime, les personnes chargées de la sûreté nucléaire. Vous déboulonnez le cadre de notre sûreté nucléaire, qui est le fruit d'une longue histoire, reconnu pour sa qualité technique, son indépendance et sa capacité à rendre compte de façon transparente.
Notre modèle repose sur quatre piliers : EDF, notre exploitant public et unique, est le premier responsable de la sûreté de ses installations ; l'ASN contrôle l'exploitant ; l'IRSN offre à l'ASN un appui technique transversal dans toutes les composantes de la sécurité nucléaire ; tout cela se déroule sous le regard de la société civile, qui est informée et consultée. Avec ce projet de réforme, vous pilonnez trois de ces quatre piliers : vous arrachez à EDF son statut d'exploitant exclusif, en libéralisant et en privatisant le marché de l'énergie nucléaire ; vous diluez l'expert qu'est l'IRSN et lui faites perdre son autonomie, son intégrité et l'approche transversale de ses compétences ; vous réduisez la place de la société civile en rétablissant la simple information du public d'il y a trente ans.
Cette réforme fait froid dans le dos. Je vous invite tous, que vous soyez pour ou contre le nucléaire, à réfléchir sérieusement à sa portée. Nous ne pouvons pas sérieusement accepter de tels reculs s'agissant d'une question aussi sérieuse que la sûreté nucléaire.