Je ne m'attarderai pas sur la manière dont nous travaillons dans cette commission, parfaitement inadaptée à la complexité des sujets et à l'enjeu démocratique. Sachez juste que nous ne sommes pas du tout satisfaits.
Cette proposition de loi, qui ne s'appuie pas sur un avis du Conseil d'État, fait l'objet d'une procédure accélérée et ne pourra pas, pour des raisons temporelles, prendre en compte les conclusions du rapport sur le recours aux algorithmes dans le cadre de la prévention des actes de terrorisme.
Avec ce texte, nous sommes en présence d'un objet bien étrange, d'un florilège de notions floues et indéfinies. Ce qui est tout à fait clair, c'est qu'il offre, une nouvelle fois, la possibilité de recourir à la collecte et au traitement de masse des données, qui fait courir des risques évidents à nos droits et à nos libertés fondamentales.
La définition de l'ingérence étrangère, qui est vieille comme le monde, ou en tout cas comme les États, est introuvable. Aucun des amendements qui ont été déposés n'en propose une précise. Les notions d'influence et d'ingérence se superposent. C'est pourtant bien le mot « influence », et non « ingérence », qui est adopté dans les textes de loi étrangers, même dans le FARA américain. L'ingérence, elle, est un concept anxiogène, évoquant une menace étrangère clandestine et la violation de la souveraineté de notre pays. Le choix de ce terme va dans le sens du vocabulaire militariste du Président de la République, lui qui parle de « réarmement démographique ».
C'est à se demander si la proposition de loi ne cherche pas à mettre en avant une notion anxiogène afin de justifier politiquement des mesures liberticides. Dans un État de droit, on ne peut pas contrôler un phénomène, on ne peut pas légiférer sur quelque chose qui n'est pas défini par la loi. Les représentants d'intérêts agissant pour le compte d'un mandant étranger ne sont pas plus définis. Ce sont les ONG, les syndicalistes, les agents de consulat et d'ambassade ou les journalistes qui ne relèvent pas de la définition des entreprises éditrices qui sont visés. Tout ce petit monde serait volontairement soumis à un fichage. Nous nous opposons, par principe, à l'extension d'une surveillance de masse.