Je constate que le texte suscite des interrogations légitimes dans les deux assemblées, les sénateurs partageant notre souci de ne pas légiférer pour rien. En réalité ce n'est d'ailleurs jamais pour rien : un mauvais texte vient troubler le travail du juge et le ralentir, sans bienfait pour la société. D'où notre exigence quant à la qualité légistique des textes.
Celui-ci revient devant nous après l'échec de la CMP dans le cadre d'une procédure accélérée. Il faudrait d'ailleurs cesser d'y recourir si souvent vu le nombre de textes que notre commission examine. Contrairement à ce que prétend l'article d'un quotidien qui épingle bien injustement le travail du Parlement, nous sommes en effet très occupés en commission des lois, l'agenda le montre bien.
Ce texte procède d'un constat : le phénomène des dérives sectaires n'a pas faibli. Les gourous peuvent désormais passer par de multiples canaux, comme les stories Instagram ou les groupes Telegram. Les victimes de ces influenceurs dangereux, qui seraient de plus en plus jeunes, tombent ainsi dans l'isolement car ces intrusions à l'aide des réseaux sociaux se produisent souvent à l'insu de l'entourage. Cette situation mérite que le législateur s'y penche. Le texte procède donc d'une bonne intention, mais nous partageons les craintes exprimées par le Sénat de la voir dériver en atteintes à la liberté d'expression et à la liberté d'être, voire en abandon d'une forme de responsabilité individuelle pourtant constitutive de notre société.
Cela étant dit, ce texte est aussi une réponse à une situation préoccupante, aggravée par les réseaux sociaux et les multiples interactions possibles dans le monde numérique. Comme l'a dit Xavier Breton, l'article 4 pose problème. La loi doit préserver un équilibre. Nous l'examinerons en ce sens, sans vous donner pour le moment nos intentions de vote.