Intervention de Thomas Ménagé

Réunion du mercredi 13 mars 2024 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThomas Ménagé :

Nous voilà donc au deuxième examen de ce texte devant notre commission. Les débats se cristallisent autour de l'article 4, qui n'est ni fait, ni à faire. Ce sont les errements juridiques graves de cet article qui empêchent l'adoption du texte. L'échec de la CMP s'explique sans doute par votre refus de faire un pas vers la suppression de cet article.

Se tromper est humain, mais persister dans son erreur est diabolique. Vous préférez pourtant persister au lieu d'écouter ce que tout le monde vous dit depuis le début de l'examen de ce texte, et que nous répéterons encore ce matin. Le Conseil d'État vous l'a dit ; le Sénat vous l'a fait savoir, par son vote et par la voix de la rapporteure de sa commission des lois ; l'Assemblée nationale vous l'a répété en commission et, j'y insiste, lors d'un premier vote en séance. Après l'échec de la CMP, nous vous le disons encore : renoncez à l'article 4 !

Il ne s'agit pas de renoncer à l'ensemble du texte, seulement à cet article. Vous avez vous-mêmes admis qu'il devait être modifié, quand vous l'avez fait évoluer en catastrophe pendant la séance publique. D'autres évolutions, certainement bienvenues, interviendront encore. Nous les appuierons mais elles ne suffiront pas à lever les principales difficultés qui se posent. Cette seule disposition empêche notre groupe de soutenir ce texte. Lutter contre les dérives sectaires est une noble tâche et le texte serait déjà voté, si vous aviez été capables d'écouter au lieu de vous obstiner.

Si vous cherchez sincèrement le consensus sur un sujet si important – un reportage de l'émission « Zone interdite » sur M6 nous en rappelait, cette semaine encore, la gravité –vous devriez écouter les oppositions. L'avis de sagesse rendu par une secrétaire d'État au sujet d'un de nos amendements, pourtant susceptible de tous nous réunir, aura suffi à provoquer un incident de séance et une catastrophe dans les rangs macronistes. Une partie de notre assemblée, manifestement moins soucieuse de lutter contre les dérives sectaires que pour sa propre survie politique, défend son camp plutôt que les victimes de ce mal qui ne fait que progresser.

Vous savez du reste pertinemment que l'article 4 risque fort d'être censuré par le Conseil constitutionnel. Vous préférez pourtant foncer tête baissée vers le mur : comme à votre habitude, vous faites passer votre fierté mal placée avant l'intérêt des Français, et en l'occurrence avant l'intelligibilité et la certitude de la loi.

Ce qui s'est passé en séance est proprement scandaleux. L'incident révèle votre fébrilité, peut-être liée aux élections européennes. Après avoir perdu le premier vote, vous avez rappelé vos troupes pour revenir sur la suppression de cet article 4. Après un rejet du Sénat, un avertissement du Conseil d'État et un vote de suppression, il vaut mieux accepter sa défaite et respecter la démocratie parlementaire !

Plusieurs dispositions de ce texte pourraient pourtant motiver un vote favorable de notre groupe, en particulier le statut législatif de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes). D'autres dispositions suscitent notre inquiétude. Ainsi, l'article 6 bis risque de créer une chape de plomb : en permettant aux médecins de casser le secret médical, il risque de dissuader les victimes de se confier, aggravant leur enfermement mortifère – l'exemple même d'une fausse bonne idée.

Bref, évoluez au sujet de l'article 4 et vous obtiendrez un vote consensuel sur un texte susceptible d'apporter des solutions aux victimes de dérives sectaires !

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