Intervention de Jérémie Iordanoff

Réunion du mercredi 6 mars 2024 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérémie Iordanoff :

Je suis stupéfait par cette proposition de loi organique : s'il existe bien une déconnexion entre nos concitoyens et leurs représentants, le texte va dans le sens inverse de celui que nous devrions suivre.

Vous l'avez dit, le cumul des mandats est une constante en France depuis la monarchie de Juillet : à l'époque, l'élu devait représenter son territoire face à un État central tout-puissant. Le système, le monde, ont changé. Les expériences de la démocratie dans d'autres pays le montrent aussi, le rôle de l'élu n'est plus le même. Le temps s'est accéléré. Le mandat de parlementaire en prenant beaucoup, on ne peut pas mener à bien cette mission en exerçant en plus une activité professionnelle ou un autre mandat au niveau local.

Je peux entendre les arguments de l'indépendance du législateur par rapport à l'exécutif. Il est nécessaire que cet impératif s'impose : dans une démocratie moderne, le législateur doit être indépendant, mais il existe d'autres mécanismes pour atteindre ce but. Il faut par exemple déconnecter les élections législatives de l'élection présidentielle ou que le chef de l'État ne soit pas celui de la majorité.

Si l'on veut que le Parlement contrôle réellement l'action du Gouvernement, on doit par ailleurs lui donner les moyens financiers, d'enquête et de contrôle pour exercer sa mission. Historiquement, dans toutes les démocraties modernes, le Parlement a pour première mission de voter le budget. Or, en France, l'article 49.3 de la Constitution le prive de sa principale prérogative. Cette prérogative, il faut la donner aux parlementaires, comme l'attendent les Français.

Pour ce qui est de la déconnexion avec le territoire, la cohérence et la clarté sont nécessaires. Tous les élus ne peuvent pas être des élus locaux : le mandat parlementaire est national. Le parlementaire doit bien sûr être connecté avec la réalité, mais ce n'est pas en cumulant trois, quatre ou cinq mandats qu'il sera en contact avec ses concitoyens car ce cumul représente du temps en moins pour des rencontres sur le terrain.

Quant à la féminisation, on a avancé depuis 2014, même si ce n'est pas assez. Il faudrait que le mode de scrutin des élections législatives contraigne à la parité. Compte tenu de l'évolution de la société, le mécanisme de cumul que prévoit le texte irait à l'encontre de la féminisation de la représentation nationale. En conséquence, nous voterons contre.

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