Je vous remercie Monsieur Cazeneuve d'avoir salué le rôle des maires. C'est un soutien moral que nous prenons.
Nul ne conteste la nécessité pour l'État de jouer parfois le rôle d'amortisseur ni la pertinence des mesures mises en œuvre tant au début de la crise covid qu'au moment de la crise énergétique. Je remarquerai cependant que cette crise énergétique est aussi la conséquence du démantèlement de la filière nucléaire décidé par les mêmes qui ont ensuite compensé. La situation aurait été bien différente s'il n'y avait pas eu cette loi de programmation qui prévoyait la fermeture de quatorze réacteurs, dont la fermeture effective de Fessenheim, et le non-entretien du parc nucléaire. Nous avons été privés d'une énergie pilotable, décarbonée et bon marché.
Sur la compensation de l'État – ce n'est pas la position de l'AMF – la prolongation du quoi qu'il en coûte alors que nous étions informés de la létalité et de la transmission du virus, et que d'autres pays avaient abandonné la compensation financière de restrictions de libertés, s'est traduite par une augmentation de la dette de l'État.
Cependant, cette augmentation n'a représenté qu'environ un quart des 800 milliards d'euros de hausse de la dette de l'État depuis sept ans. Les trois quarts restants sont liés à des dépenses de l'État sur d'autres fonctions.
Je crois qu'il existe une différence fondamentale entre nous. Tout d'abord, nous sommes très attachés à l'État et ce d'autant plus que nous en sommes une constituante en tant que citoyens et en tant que maires. Nous sommes très attachés à un État à sa juste place et au service de la société et de la volonté populaire. Cela s'appelle la démocratie.
De plus, nous ne voulons pas simplement libérer les collectivités territoriales. Nous voulons aussi libérer l'État des surcharges qu'il s'est confiées et qui le paralysent dans son action. Nous voulons sortir d'une relation que nous considérons comme infantilisante de devoir chaque année nous battre pour obtenir les compensations de l'État.
Vous estimez que nous devons être des exécutants. Vous avez raison, mais uniquement en ce qui concerne les missions d'autorité de l'État. Le reste appartient à la démocratie locale et c'est à nous – et aux habitants qui nous ont mandatés – de décider ce que nous devons et pouvons faire. C'est une question fondamentale et à titre personnel, je crois que l'efficacité de l'organisation de l'appareil public viendra de cette responsabilité locale.
Quant au contexte international, il nécessite effectivement de revenir à une autorité de l'État sur le plan militaire, diplomatique, c'est une évidence. Vous remarquerez que plus l'État a mis sous tutelle les collectivités territoriales, moins il a disposé de moyens pour assumer ses fonctions régaliennes et relever les défis de notre temps. Nous sommes là au cœur de l'organisation des pouvoirs publics, de la décentralisation, de la déconcentration des services de l'État, et d'un principe qui devrait être au centre de l'action publique et qui est celui de la subsidiarité. Nous sommes les promoteurs et les défenseurs de la subsidiarité. C'est le seul moyen de faire respirer les collectivités locales et de redonner à l'État sa capacité d'action.
Je tiens par ailleurs à vous rassurer, les communes et les maires de France ne demandent pas une augmentation de la pression fiscale. Par contre, contrairement à la doxa qui nous est servie quotidiennement, je constate que la France détient le record des prélèvements obligatoires, impôts et charges. C'est une réalité qui doit être appréciée au prisme de la perte d'autonomie fiscale locale.
Nous pensons que dans une logique d'esprit civique, la fiscalité locale doit être sur la base d'un impôt universel avec la prise en compte des réalités particulières de ceux qui sont en souffrance et en difficulté. Mais les maires de France ne demandent pas pour autant une hausse de la fiscalité.
J'ajouterai qu'il n'y a pas de position de l'AMF sur la question de la désindexation des valeurs locatives. Si l'indexation correspond au respect de la parole de l'État, nous pourrions tout à fait imaginer un système de libertés, y compris sur la valorisation des bases. Je ne prends pas parti mais c'est une réflexion que nous pourrions mener.