Intervention de Stéphane Brossard

Réunion du lundi 26 février 2024 à 15h00
Commission d'enquête sur la gestion des risques naturels majeurs dans les territoires d'outre-mer

Stéphane Brossard, président de la commission technique de la Fédération réunionnaise du bâtiment et des travaux publics :

Je représente la Fédération réunionnaise du bâtiment et des travaux publics (FRBTP), qui est un syndicat de constructeurs, présent à l'île de La Réunion depuis plus de soixante-dix ans. Nous avons acquis un savoir-faire constructif adapté au climat local. Nous construisons dans les zones qui nous sont réservées, en dehors des lieux soumis à l'activité du volcan. Nous bâtissons dans des zones exposées aux vents alizés, à la corrosion, à un rayonnement ultraviolet très élevé, à des températures oscillant entre 15 et 35 degrés, à une humidité quasi-permanente. Les vents peuvent être quasi cycloniques, comme nous l'a montré récemment l'exemple de Belal.

Notre savoir-faire repose en particulier sur le contreventement, qui nous permet de stabiliser l'ouvrage et, surtout, de l'ancrer au sol ou aux fondations. C'est la base de la construction dans un climat cyclonique. Nous employons des technologies particulières, des structures et des couvertures différentes de celles que l'on rencontre habituellement en France, notamment la tôle ondulée.

On doit malheureusement constater l'inadaptation des normes outre-mer, par exemple des DTU (documents techniques unifiés). La tôle ondulée a ainsi été retirée – de manière inadmissible, selon nous – de la liste de l'Afnor (Association française de normalisation) en 2004 par une décision prise à l'échelon national, alors que c'est une technique très éprouvée, résistante aux vents cycloniques, qui a la capacité de renvoyer une partie de la chaleur, surtout si le matériau utilisé est clair. Elle convient au climat de la plupart des outre-mer. Alors que nos professions se sont adaptées pour protéger les habitants des outre-mer, on ne peut que regretter la décorrélation entre ce qui se fait à l'échelon national et les réalités ultramarines.

On constate des difficultés d'application des normes d'accessibilité, dites PMR (personnes à mobilité réduite), sur des territoires volcaniques, à forte pente. L'application de la réglementation thermique, acoustique et aération (RTAA-DOM) à La Réunion a entraîné une évolution des techniques constructives mais a aussi engendré de nombreux sinistres, car on nous a demandé parallèlement d'aménager des passerelles permettant une ventilation traversante sans seuil d'accessibilité. Une mise en œuvre stricte de la réglementation peut favoriser la sinistralité et l'insalubrité. Autrement dit, le taux d'insalubrité est lié au climat de nos territoires mais aussi à des technologies inadaptées à ces derniers.

S'agissant des normes paracycloniques, je partage l'analyse qui a été faite : porter son attention exclusivement sur le vent est une erreur stratégique, que nous avons signalée au Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB). C'est en effet l'eau qui tue : Belal a ainsi causé le décès de quatre personnes, par noyade, à La Réunion, alors que le vent n'a entraîné aucun dégât structurel sur les constructions.

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