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Intervention de Sylvie Retailleau

Réunion du mardi 5 mars 2024 à 16h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Sylvie Retailleau, ministre :

À l'heure de toutes les transitions dans un monde en proie à des crises multiples, les contributions du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche sont essentielles. Je reviendrai donc sur les axes du projet que je mène après qu'il m'a été confié par le Président de la République et le Premier ministre.

Il nous faut avant tout continuer de libérer les potentiels en œuvrant pour l'émancipation de nos chercheurs et de nos étudiants selon le cap tracé par le président de la République le 7 décembre dernier dans son discours sur l'avenir de la recherche en France. Son propos se décline en trois points : placer la science au cœur de nos décisions et renforcer l'attractivité des métiers scientifiques, de la recherche en particulier ; clarifier les modalités de pilotage des organismes nationaux de recherche et des universités ainsi que leurs rôles respectifs ; gagner en simplicité pour redonner du temps de recherche aux chercheurs et aux enseignants-chercheurs.

Dans la réalisation de ces objectifs, les organismes nationaux de recherche, les universités et les écoles ont un rôle majeur à jouer, en complémentarité et non en concurrence, ce qui implique une articulation renforcée. À cette fin, les organismes nationaux de recherche seront transformés en agences de programme. Chacune devra définir des thématiques de recherche prioritaires, organiser la veille scientifique dans son domaine et déployer efficacement les programmes de recherche nationaux. D'autre part, l'acte II de l'autonomie des universités sera mis en œuvre ; elles auront une place centrale en tant que chef de file de l'organisation de la recherche scientifique sur leur territoire. Enfin, un grand choc de confiance doit permettre à nos chercheurs et enseignants-chercheurs de regagner du temps utile à la recherche grâce à des mesures de simplification efficaces. Notre objectif est aussi de construire et de consolider un leadership français dans certains domaines scientifiques prioritaires afin que la France accompagne et soutienne les transformations techniques, sociétales, sanitaires et environnementales en cours. Je forme également le vœu que les travaux de nos chercheurs, qui révolutionnent la médecine, la connaissance de l'univers et celle des sociétés, soient mieux mis en valeur, en particulier dans les media.

Nous devons donc continuer à faire évoluer l'offre de formation pour donner à notre jeunesse les moyens de relever les défis du monde de demain et faire de nos étudiants les acteurs de leur destin et de celui de la Nation. Pour cela, il nous faut adapter l'offre de formation, en particulier celle du premier cycle ; mieux orienter les futurs étudiants dès le lycée sinon plus tôt ; cerner les besoins auxquels nous voulons répondre. Nous avons déjà fait beaucoup avec la réforme des bachelors universitaires de technologie et le développement de l'apprentissage dans l'enseignement supérieur. Il nous faut poursuivre, et aussi redoubler d'efforts au sein des établissements.

Pour que la formation soit un véritable levier d'émancipation, elle doit être un instrument de lutte contre les fractures sociales, ainsi garante de l'égalité des chances. Être ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, c'est être ministre des étudiants. Je suis consciente des difficultés que connaissent certains d'entre eux et l'une de mes priorités a toujours été d'améliorer leurs conditions de vie et d'études et d'assurer à tous les mêmes chances de réussite dans l'enseignement supérieur. C'est pourquoi nous poursuivons le vaste et nécessaire chantier de la réforme du système de bourses sur critères sociaux, encore imparfait. En 2023, la première étape s'est traduite par l'accroissement du nombre de boursiers et la plus forte augmentation des bourses depuis dix ans. Pour aider davantage ceux qui en ont le plus besoin, la deuxième étape consistera en la modification structurelle du dispositif pour le rendre plus redistributif, plus efficace et plus cohérent avec les autres prestations sociales dès la campagne 2025. Nous demeurons vigilants pour chaque enjeu de la vie étudiante, dont la restauration et le logement, domaines dans lesquels nous appliquons les mesures annoncées dernièrement.

Renforcer l'égalité et œuvrer en faveur de la justice sociale, c'est aussi participer à la construction d'une société soudée et unie contre les violences. Le « vivre ensemble » repose sur des relations saines et bienveillantes, le refus de nuire et de porter atteinte à autrui, le respect de l'altérité. C'est pourquoi j'ai fait une priorité absolue de la lutte contre tout ce qui vient heurter notre cohésion : l'antisémitisme et toute forme de violence ou de discrimination.

J'en viens au plan d'économies et aux 904 millions d'euros de crédits annulés pour la recherche et l'enseignement supérieur. Cette contraction concerne l'ensemble de la Mires. Pour les trois programmes dont j'ai la responsabilité, les annulations de crédits, fixées à 588 millions d'euros, concernent essentiellement trois champs. La plus grosse part s'impute, à hauteur de 434 millions, sur les réserves de précaution. Elles se traduisent aussi par le report de projets pluriannuels immobiliers, d'investissements ou d'équipements de recherche ; nous nous donnons quinze jours pour définir ce qui aura le moins d'impact à court terme cette année et qui pourra être redéployé les années suivantes. L'annulation de crédits se traduira encore par des ajustements sur des accords bilatéraux et sur les appels à projets de l'Agence nationale de la recherche (ANR), sans revenir en arrière ; nous tenons à conserver le taux de succès augmenté que nous avons obtenu et nous nous attacherons à redéployer ces projets au cours des années à venir.

Même compte tenu de ces annulations de crédits, le budget de mon ministère reste en hausse en 2024 et, de manière générale, les moyens de fonctionnement de l'ensemble des organismes, universités et écoles relevant de mon ministère sont préservés. C'est le cas pour les moyens clés des organismes de recherche, les universités et les écoles pour le volet recherche, et pour les mesures relatives aux ressources humaines contenues dans la loi de programmation de la recherche (LPR) pour l'ensemble des établissements. La LPR et le plan d'investissements d'avenir France 2030 démontrent la confiance que le Gouvernement place dans la recherche française. Ces fonds sont préservés.

Tous les engagements relatifs à la vie étudiante seront tenus, qu'il s'agisse du logement, de la restauration ou du versement des bourses à l'ensemble des bénéficiaires éligibles. En particulier, pour le programme Vie étudiante, le budget des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) n'est pas affecté : les annulations portent uniquement sur la réserve de précaution. Dans le programme Enseignement supérieur et recherche universitaire, seuls les projets immobiliers seront reportés, à l'exclusion des projets de logements étudiants qui ne seront pas touchés.

Nous sommes dans la phase de reprogrammation des dépenses. Des précisions pourront vous être apportées dans les semaines à venir sur la répartition de ces économies par rubriques. Même si leur impact à court terme est contenu, je ne cache pas que ces économies sont difficiles. Elles doivent être envisagées en rapport avec la situation budgétaire globale et avec nos objectifs nationaux.

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