Rendez-vous est pris, en effet. Je voudrais seulement verser quelques chiffres au débat dès ce soir. Qui pourrait être concerné par cette mesure ? Aujourd'hui, selon le Conseil d'analyse économique (CAE), « 50 % des individus auront hérité de moins de 70 000 euros tout au long de leur vie ». Voilà quel est l'héritage médian. « En revanche, moins de 10 % des individus héritent de plus de 500 000 euros » ; parmi eux, « le top 1 % des héritiers d'une génération recevra en moyenne plus de 4,2 millions d'euros nets de droits ». Je voudrais aussi rappeler qu'avec l'abattement de 100 000 euros tous les quinze ans, une personne peut, de sa naissance à son quarante-cinquième anniversaire, recevoir 1,28 million d'euros sans impôt. Avec votre proposition, cette somme s'élèverait à 2,8 millions d'euros. Cela coûterait 7 milliards d'euros à l'État.
Madame Bergé, vous expliquiez qu'il s'agissait de transmettre le fruit du travail de toute une vie. Le problème, c'est que, de génération en génération, la part du travail s'amenuise, tandis qu'il est de plus en plus important d'être bien né, d'avoir eu la chance de naître dans une famille riche. Au bout d'un moment, on naît de moins en moins égaux en droit. C'est un problème de fond. Nous aurons le temps d'y réfléchir, mais il me semble qu'il faut garder ces chiffres en tête, tout comme il faut être conscient d'un paradoxe : la plupart des Français se sentent solidaires de ces personnes qui possèdent des richesses qu'eux-mêmes ne verront jamais que de loin, alors que si, ces richesses n'étaient pas taxées, ils s'en trouveraient desservis : les 7 milliards que coûterait cette mesure servent à financer des services publics et des mécanismes de solidarité dont profitent ces Français, encore une fois très majoritaires, qui n'ont pas ou peu d'héritage.