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Intervention de Philippe Dunoyer

Séance en hémicycle du lundi 18 mars 2024 à 16h00
Report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la nouvelle-calédonie — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Dunoyer, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Ces amendements de suppression sont les mêmes que ceux qui avaient été déposés en commission. Ils sont importants, aussi prendrai-je le temps de donner les arguments qui doivent nous conduire à les rejeter ; il n'y a pas de hiérarchie entre eux.

Le premier est que le Congrès de la Nouvelle-Calédonie a voté pour le report des élections à trente-huit voix contre cinquante-quatre. Surtout, ce vote est représentatif des deux sensibilités, puisque l'un des deux principaux partis indépendantistes était favorable au report ; l'autre parti a donné un avis défavorable, tout en disant qu'il le comprenait. Le sujet du corps électoral est dans toutes les têtes, bien sûr, mais c'est ici du report des élections dont il est question. Sur ce sujet, voilà l'avis exprimé par les partis politiques calédoniens, représentant les deux sensibilités. Pourquoi demandent-ils ce report ? Parce que, pour faire émerger les discussions, il faut du temps.

Il y a une contradiction entre votre intention de parvenir à un consensus, que je partage, et votre refus du texte. En effet, si nous ne reportons pas les élections provinciales, elles auront lieu, comme dirait M. de La Palice ; elles seront convoquées en avril et se tiendront en mai.

On peut ne pas croire à la réalité du risque juridique qui a été évoqué par M. le ministre et par moi-même et, surtout, rappelé par le Conseil d'État, dans son avis du 7 décembre 2023, lequel, tout en rappelant la spécificité du caractère de la Nouvelle-Calédonie, indique que « la compatibilité des règles en vigueur avec les engagements internationaux de la France en matière électorale est incertaine » et que « les dispositions […] de la Constitution […] ne font pas obstacle à ce que le législateur [intervienne] pour atténuer » – c'est ce mot qu'il faut retenir – « l'ampleur des dérogations aux principes d'universalité et d'égalité du suffrage, lesquelles auront, avec l'écoulement du temps, des effets excédant ce qui était nécessaire à la mise en œuvre de l'accord de Nouméa. » Le Conseil d'État est on ne peut plus clair : il est toujours possible de déroger à ces règles – si nous avons trois listes électorales, c'est bien par dérogation –, mais nous ne pouvons pas le faire en 2024 de la même manière qu'en 1999 ou en 2007. Si le Conseil d'État nous incite à reporter les élections, c'est parce que si les élections sont convoquées et le décret annulé ensuite, non seulement nous n'aurons pas de temps pour la discussion, mais nous aurons créé en Nouvelle-Calédonie un climat qui empêchera cette discussion pour de pures raisons d'opposition électorale. Reporter ces élections, c'est donner du temps pour l'émergence de l'accord que vous appelez de vos vœux.

Deuxièmement, puisque le mot a été utilisé par certains, je veux dire qu'il n'y a pas d'ultimatum. La raison, que j'évoque dans mon rapport, en est que le projet de loi organique s'entend avec le projet de loi constitutionnelle : c'est dans le projet de loi constitutionnelle que figure la possibilité de reporter à nouveau les élections provinciales après la fin de l'année 2024, et ce report fait l'objet d'un amendement que nous discuterons prochainement. Le Gouvernement avance donc de manière transparente en disant que le premier choix est de fixer les élections à la fin de l'année 2024 ; si les discussions surviennent, et c'est ce que nous souhaitons tous, le projet de loi constitutionnelle prévoit la possibilité d'un nouveau report des élections provinciales par un décret en conseil des ministres, lequel, comme je l'ai indiqué dans mon intervention et dans le rapport, pourra être remplacé par un nouveau projet de loi organique. Ce n'est pas un ultimatum, c'est une modalité qui encadre les nécessaires modifications du corps électoral puisque, selon les services du haut-commissariat, il faut entre quatre et six mois pour procéder à ces modifications.

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