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Intervention de Max Mathiasin

Séance en hémicycle du lundi 18 mars 2024 à 16h00
Report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la nouvelle-calédonie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMax Mathiasin :

À plusieurs reprises, j'ai entendu parler ici de dialogue, d'échanges, de discussions, de négociations, de recherche de compromis… Tout cela est très bien, mais est-on effectivement parvenu à un consensus ? Je ne nie pas les efforts déployés ces dernières années, mais dialogue ne veut pas dire accord. Or aucun accord n'a été trouvé au niveau local : il n'y a ni consensus ni adhésion à un projet commun.

L'État ne peut imposer son propre agenda. Le Gouvernement ne peut décider sans un accord clair avec les Kanaks du report des élections, de la modification du corps électoral, du changement de la Constitution. Sinon, quelle crédibilité auraient ces réformes ? Quelle confiance pourrait-on accorder dans la parole de l'État ? Qui peut prétendre vouloir construire un avenir en commun en passant par la force ?

Il importe d'être constant sur des sujets aussi fondamentaux. Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires a toujours considéré que toute réforme touchant les élus locaux devait se faire en partenariat avec eux, non contre eux. C'est d'autant plus vrai s'agissant d'un territoire d'outre-mer jouissant d'une aussi grande autonomie que la Nouvelle-Calédonie.

Il ne faut pas omettre le passé douloureux de la Nouvelle-Calédonie, ni le fait qu'elle est inscrite par l'ONU, depuis 1986, sur la liste des territoires à décoloniser. Cette situation devrait pousser à conduire toute évolution de manière apaisée. Certes, cela prend du temps, beaucoup de temps, mais il me paraît préférable de prendre le temps nécessaire plutôt que de légiférer sans consensus, et sans l'aval des Kanaks.

Jamais anodin, le report des élections porte atteinte à l'exercice régulier du droit de vote. Alors, que dire quand les élections sont prévues dans quelques semaines ? Est-ce le signe du bon fonctionnement d'une démocratie ?

J'ai entendu le Gouvernement dire que le non-report pourrait entraîner l'annulation du scrutin pour des raisons d'exigences démocratiques. Pourtant, depuis 2005, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) affirme que, compte tenu de l'histoire et du statut de la Nouvelle-Calédonie, il existe des « nécessités locales » qui permettent de restreindre le droit de vote. Cette interprétation a été récemment validée par un arrêt de la Cour de cassation de juin 2023.

Tant que l'archipel est sur la voie de la décolonisation, l'évolution du corps électoral ne peut se faire que dans le consensus. C'est la raison pour laquelle notre groupe regrette le choix de lier report des élections et dégel du corps électoral, car cela est une manière de préempter le débat. Personne ne peut ignorer que ce dégel aurait des effets sensibles sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, la préservation de l'identité kanak, la construction d'une citoyenneté calédonienne et les efforts de rééquilibrage politique des dernières décennies. Toute évolution nécessite au préalable un accord local sans lequel de très fortes tensions pourraient ressurgir dans le territoire. La liberté de vote est de mise au groupe LIOT mais, pour ma part, j'appelle à rejeter le texte du gouvernement.

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