Intervention de Sébastien Lecornu

Séance en hémicycle du mardi 12 mars 2024 à 15h00
Déclaration du gouvernement relative à l'accord de sécurité franco-ukrainien et à la situation en ukraine suivie d'un débat et d'un vote

Sébastien Lecornu, ministre des armées :

Je reprendrai quelques-uns des éléments qui ont émaillé vos interpellations ou vos interrogations concernant l'aide militaire que nous apportons à l'Ukraine depuis le début du conflit et les perspectives pour l'avenir que dessine l'accord. J'ai eu l'occasion d'y répondre en partie en réunion de la commission de la défense.

Rappelons-le, nous fournissons des armements, des équipements militaires, des munitions, mais aussi de la formation. Celle-ci a été trop peu évoquée alors qu'elle est centrale, puisque la France forme près d'un tiers des soldats ukrainiens inclus dans la mission d'assistance militaire de l'Union européenne. Cet effort de formation ne saurait être déconnecté des équipements militaires que nous donnons.

La première fonction militaire de ces dispositifs est la défense sol-air, incluant tous les niveaux de la lutte antidrones : les armes de courte, moyenne et haute portées – les Mistral, le VL Mica appelé à remplacer les Crotale, les missiles Aster du programme Samp(-T) (système sol-air de moyenne portée terrestre) – que nous avons pu donner à l'Ukraine permettent de protéger non seulement le champ de bataille, mais aussi les villes, les infrastructures civiles et énergétiques, et les populations civiles. C'est bien entendu sur cet axe que nous devrons concentrer nos efforts dans les prochains mois puisque la Russie assume désormais une posture très agressive dans l'espace aérien. C'est, en miroir, la maîtrise de la défense sol-air qui permettra de faire la différence.

La deuxième fonction militaire est l'artillerie : on ne peut pas tenir de ligne de front ni mener de contre-offensive sans maîtriser les fonctions de l'artillerie. C'est en cela que le canon Caesar est devenu le symbole d'une aide militaire efficace. Toutefois, il ne suffit pas : il faut aussi fournir les pièces détachées, les éléments d'un maintien en condition opérationnelle, les obus et l'ensemble de ce qui participe à l'organisation globale des fonctions de l'artillerie.

J'en viens au dernier élément, qui nous singularise, à l'instar de nos amis britanniques : nos capacités de frappe en profondeur, c'est-à-dire derrière la ligne de front. Les Britanniques ont ouvert la voie en livrant des Storm Shadow, produits par MBDA UK, et nous avons suivi en livrant des Scalp, qui correspondent au même type de missiles, produits par MBDA France. Nous poursuivrons nos efforts en ce sens. Le Premier ministre l'a rappelé tout à l'heure, les cessions de bombes guidées dites AASM sont essentielles pour permettre aux Ukrainiens de tenir. Nous le constatons d'ailleurs depuis dix jours : alors qu'une ligne de front avait commencé à s'éroder massivement, cette érosion a été freinée grâce à ces bombes air-sol guidées, de fabrication française. Nous comptons en livrer plus de 600 cette année, ce qui relève d'ailleurs d'une prouesse technologique, puisque nous avons réussi à adapter ces bombes, traditionnellement acheminées par avions Rafale ou Mirage, sur des avions de classe soviétique, afin que les Ukrainiens puissent disposer de cette fonction.

Si je vous livre ces éléments, c'est qu'au-delà des chiffres, il s'agit de procéder à des cessions d'équipements militaires utiles et efficaces – c'est ce que nous faisons depuis le début, ce qui contribue à asseoir la crédibilité de la France dans la durée.

Le classement établi par l'Institut d'économie mondiale de Kiel en matière d'aide militaire, commenté à plusieurs reprises, est faux en ce qu'il ne prend en compte que les éléments promis, déclarés publiquement, et non pas les matériels réellement livrés. Or vous le savez, ce n'est qu'il y a dix jours que nous avons fait la transparence sur l'ensemble des cessions d'armes effectuées depuis deux ans. Par définition, ce classement devra donc être mis à jour. D'autre part, il est adossé à un Land allemand. D'autres think tanks pourront sans doute nous fournir des données. Quand j'entends des représentants de groupes politiques se référer de nouveau à ce classement alors que nous ne cessons de répéter qu'il n'est pas fidèle à ce que nous avons accompli ni même, monsieur le président Marleix, au rapport parlementaire issu de cette maison même, qui place l'aide militaire de la France à un autre niveau, je ne peux donc qu'être extrêmement surpris !

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