Le Président de la République aura tout de même tardé à assumer sa fermeté, après avoir tenté jusqu'au bout de négocier avec Poutine, frôlant parfois même l'humiliation. Sa position est désormais clarifiée, ce qui est une bonne chose. Alors que se profile à l'horizon une possible réélection de Donald Trump, il s'agit plus que jamais de mettre enfin en œuvre l'autonomie stratégique européenne.
Nous considérons également que dire c'est bien, mais que faire, c'est mieux. Nous pensons à nos engagements trop réduits en matière d'armements – notre soutien représente 3,8 milliards d'euros alors que celui de l'Allemagne s'élève à 18 milliards –, étant toutefois précisé que nous livrons réellement ce que nous promettons.
Mettons aussi en garde le Président de la République sur les dangers de l'isolement. Nous ne contestons pas l'utilité de l'ambiguïté stratégique en matière d'utilisation de nos forces armées – c'est par définition ce qui nous rend crédibles. Néanmoins, les réserves émises par nos partenaires ont démontré que tout le monde n'était pas sur la même longueur d'onde. Nous pensons donc qu'il faut se garder de prendre des initiatives isolées.
Puisque la France assure actuellement la présidence du Conseil de sécurité des Nations unies, mettons ce mandat éphémère à profit pour remobiliser la communauté internationale et nos alliés. Renforçons les autres actions communes des Européens. Je pense ici à l'utilisation des revenus générés par les avoirs de la Banque centrale russe gelés par l'Union européenne, qui représentent 300 milliards d'euros. Je pense aussi à la protection temporaire accordée aux réfugiés ukrainiens.
Soutenons toutes les initiatives françaises qui participeront à faire reconnaître devant la Cour pénale internationale les crimes de guerre odieux commis par l'armée russe en Ukraine. Je pense notamment à l'envoi de magistrats et d'enquêteurs. Les massacres de civils, l'utilisation du viol comme arme de guerre, la destruction des hôpitaux ou les frappes contre les convois humanitaires ne resteront pas sans réponse.
La Russie perdra la guerre. Nous devons préparer la suite. Mais ne nous leurrons pas. Poutine a commencé à accomplir ses basses œuvres en Tchétchénie, en Géorgie, en Jordanie, en Crimée, puis dans le Donbass. Il menace nos intérêts en outre-mer et en Afrique, il est à l'origine des cyberattaques dont nous sommes victimes. Si nous ne l'arrêtons pas, il continuera. Après l'Ukraine, il dépècera la Moldavie puis s'attaquera aux pays baltes.