Mes mots ne vont pas sans actions. La responsabilité qui est la mienne, comme Mme Chikirou l'a souligné, est énorme, puisqu'il s'agit d'enfants. Loin de moi l'idée de faire de grandes déclarations sans accompagner les départements, les éducateurs spécialisés et les assistants familiaux pour répondre à la crise – majeure – que vit la protection de l'enfance. Si elle s'aggrave particulièrement aujourd'hui, c'est du fait d'un effondrement de l'attractivité des métiers du lien en général, à quoi s'ajoutent, dans le cas de l'aide sociale à l'enfance, des difficultés particulières : la prise en charge de jeunes handicapés, qui ont ainsi une double vulnérabilité, ou celle d'enfants victimes de maltraitance, qui ont besoin d'un accompagnement spécifique.
L'urgence est au recrutement. Pourquoi ne parvenons-nous pas à recruter des assistants familiaux exerçant déjà un emploi à temps partiel ? Je me suis attelée en priorité à cette question, et je recevrai les organisations représentant les assistants familiaux. Il faut aussi accompagner les départements dans ces recrutements. Notre pays compte moins de 30 000 assistants familiaux. La moitié des enfants pris en charge par l'ASE le sont dans des établissements collectifs, notamment en maison d'enfant à caractère social (Mecs), mais aussi – s'agissant des bébés – en pouponnières. La situation est alarmante, puisque de plus en plus de nourrissons se retrouvent en pouponnières à leur sortie de maternité, alors que nous savons combien le lien affectif est fondamental et structurant entre 0 et 3 ans.
Ces travaux ne se décrètent pas : ils doivent être effectués avec les départements et leurs services de protection de l'enfance. D'autant que, d'un département à l'autre, comme Mme Chikirou l'a rappelé, la situation est très différente. Nous devons harmoniser la prise en charge des enfants, et leur garantir un égal accès aux droits, quel que soit le territoire. Nous savons que le non-recours aux droits est, dans le cas des jeunes confiés à l'ASE, dramatique.
Le renforcement de l'attractivité des métiers de l'aide sociale à l'enfance passera par le sens qu'on leur donne, par la garantie d'un droit au répit, et par la création de structures spécifiques pour les enfants qui en ont besoin – j'ai évoqué tout à l'heure les séjours de rupture –, tout cela en concertation avec les professionnels concernés. C'est ce à quoi je m'attelle, au moment où cette crise atteint une particulière gravité.
L'amélioration de l'attractivité doit également prendre en compte la pluralité des disciplines et des métiers impliqués. C'est la raison pour laquelle mon ministère est rattaché à la fois au ministère de la justice – avec la mobilisation de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), dont j'ai besoin –, et au ministère de l'éducation nationale – avec la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) et la direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative (Djepva). Les enfants confiés à la protection de l'enfance sont d'abord des enfants, et leur accompagnement doit être global : soutien à la parentalité, accompagnement à la judiciarisation, ou encore réduction des délais afin de diminuer le nombre de mesures de placement non exécutées dans certains départements.
Tout cela ne se décrète pas mais se construit, avec les territoires, les associations et les autres acteurs. C'est ainsi que j'avancerai, dans l'intérêt des enfants.