…la plus grande d'Europe en fonctionnement puisque celle de Zaporijjia est actuellement arrêtée, et aussi parce que, sous la précédente législature, j'ai eu l'honneur de présider la commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires, dont le rapport avait insisté sur le caractère dual du système. Rappelons qu'au Japon, auquel vous avez fait référence, il n'existait pas d'autorité indépendante avant l'accident de Fukushima. On a vu ce que ça donnait : alors que la fragilité de la centrale de Daiichi avait bien été identifiée, le ministère de l'économie, qui rendait les derniers arbitrages, avait malheureusement considéré à l'époque qu'y remédier coûterait trop cher et que, de toute façon, un accident n'était pas près d'arriver.
Comparons ce qui est comparable : les réacteurs de Tchernobyl ne sont pas ceux de Fukushima, pas plus que ceux du réseau français, qui se rapproche davantage du système américain. Toutefois, les doutes doivent être levés, monsieur le ministre. Puisque le système dual fonctionne bien – n'est-ce pas, cher Bruno Millienne –, pourquoi en changer ? Parce que l'ASN manque de moyens, nous répond le collègue Pierre Henriet. Mais comment pouvez-vous être sûrs que la fusion permettra de combler ce manque et de financer l'exécution des missions aujourd'hui dévolues à l'IRSN ? Toutes ont leur utilité, on n'y paie personne à ne rien faire !
Enfin, j'ai aussi des doutes s'agissant de notre capacité à maintenir notre activité de fabrication du dosimètre, aujourd'hui assurée par l'IRSN. On a vu ce qu'il se passait quand on n'était plus capable de maîtriser la fabrication d'objets nécessaires en cas de crise, comme les masques pendant la crise de covid-19 : si, demain, nous exportions la fabrication des dosimètres, que se passerait-il si nous n'en disposions pas alors qu'un incident ou un nuage radioactif exigeait leur utilisation ?
Tous ces doutes, monsieur le ministre, s'expriment au sein même de l'autorité. La future autorité doit-elle être une autorité administrative indépendante ou une autorité publique indépendante ? Nous avons besoin de vos éclaircissements.