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Intervention de Julie Laernoes

Séance en hémicycle du lundi 11 mars 2024 à 16h00
Sécurité des élus locaux et protection des maires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulie Laernoes :

Les violences contre les élus ont augmenté de 32 % en 2022 et de 15 % en 2023. Les démissions sont également en hausse. Dans mon département, la Loire-Atlantique, les cas sont nombreux. Je pense à Yannick Morez, ancien maire de Saint-Brévin-les-Pins, dont le domicile a été incendié en mars 2023, mais aussi aux menaces publiques contre Agnès Bourgeais, maire de Rezé, lors d'une réunion publique, ou à l'agression de Sandra Impériale, maire de Bouguenais, en novembre dernier, lorsque quelqu'un s'est introduit dans son bureau, armé d'un couteau. Le choc demeure toujours. Chaque fois qu'un élu est agressé, c'est une part de notre démocratie qui s'affaisse. Car la démocratie doit être une forme de gouvernance sans violence, en tout lieu et en tout temps.

La hausse des violences envers les élus doit toutes et tous nous alerter et nous faire réagir, en tant que parlementaires bien sûr, mais en tant que citoyens surtout. Notre message est clair : quelle que soit leur forme, les violences à l'égard des élus ne sont pas tolérables dans notre société et doivent être condamnées. Il ne s'agit aucunement de faire des élus des citoyens à part, mais d'assurer leur protection dans l'exercice de leurs fonctions.

Le groupe Écologiste – NUPES votera bien sûr pour le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. Nous approuvons la sagesse du Parlement concernant la suppression de l'allongement du délai de prescription du délit de diffamation et d'injure publique contre les élus et les candidats. Si cette disposition ne visait pas la liberté de la presse, les alertes des syndicats de journalistes et de l'Association des avocats praticiens du droit de la presse ont montré que l'effet de cette mesure n'avait pas été suffisamment évalué. Les risques potentiels contre les droits des journalistes, qui doivent être préservés, ne permettaient pas d'aller dans ce sens. Nous saluons la concertation menée par Mme la rapporteure avec l'ensemble des groupes parlementaires avant la commission mixte paritaire.

Si cette proposition de loi prévoit des mesures nécessaires et attendues, elle ne réglera pas tout : elle ne préviendra pas de nouvelles violences contre les élus locaux, non plus qu'elle ne dédouanera l'État de ses responsabilités. Tout au long de l'examen du texte, nous l'avons répété : le pénal ne peut pas tout ; il permet de punir, pas de prévenir. Ainsi, aggraver les peines encourues ne doit pas nous empêcher de regarder en face les causes multifactorielles des violences : nous ne parviendrons à endiguer le mal qu'en agissant sur ses causes.

Le rapprochement des élus et des citoyens est un chantier vital pour raviver la confiance dans le système démocratique de gouvernement qui régit notre société et qui permet l'accès de chacune et chacun aux institutions sans discrimination. Or, nous le constatons, en pratique, le fonctionnement démocratique écarte et méprise trop souvent la voix de celles et ceux qui n'occupent pas les fauteuils du pouvoir.

Autre terreau des violences : l'abandon à leur sort des personnes en détresse. À portée de baffes, les maires et les élus locaux, les hommes et les femmes politiques les plus proches des citoyens, sont les premières victimes des politiques néolibérales qu'ils n'ont souvent pas décidées : tant que perdureront ces politiques qui appauvrissent les personnes, détruisent nos services publics et déshumanisent les liens sociaux, les violences ne feront qu'augmenter dans notre société.

N'oublions pas non plus l'origine des violences contre Yannick Morez, ancien maire de Saint-Brevin-les-Pins, dont la voiture a été brûlée et la maison incendiée alors qu'il y dormait avec sa famille : l'extrême droite utilise la violence pour imposer sa vision xénophobe et s'opposer à l'installation d'un centre d'accueil pour demandeurs d'asile dans une commune où le sujet n'avait jamais causé d'incident ni fait l'objet d'aucune mobilisation. L'extrême droite est de plus en plus décomplexée à mesure que ses thèmes et ses termes se répandent dans les médias et dans les discours des responsables politiques.

Pour toutes ces raisons, chers collègues, ne pensez pas et ne laissez pas penser que seule l'aggravation des peines encourues pour des faits de violences à l'encontre des élus permettra de les réduire.

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