« Tout est venu à l'Europe et tout en est venu. Ou presque tout », écrivait Paul Valéry. Il disait vrai : nous sommes les héritiers d'une histoire dont nous pouvons nous enorgueillir. Notre Europe est celle des inventeurs, celle de l'audace, de l'innovation, de l'aventure ; la mère des innombrables créateurs, savants, ingénieurs qui l'ont fait rayonner. Le viaduc de Millau, l'acropole d'Athènes, la cathédrale de Cologne, le tunnel sous la Manche prouvent de manière éclatante notre génie bâtisseur. Nous sommes ceux qui ont exploré les continents, parcouru la terre, sondé les mers : il est l'heure de repousser une nouvelle frontière, d'entreprendre une nouvelle conquête, celle du cosmos !
L'Europe du spatial, ce sont Galileo, Copernicus, Ariane 5 ; aucune de ces réussites n'aurait pu voir le jour sans la France. Notre pays est la clé de voûte du spatial européen. Sans nous, pas de grands projets, pas d'Ariane, pas de lanceurs, pas de satellites ! L'industrie spatiale française compte Thales, Airbus, une chaîne de sous-traitants et de start-up innovantes. C'est seulement en les protégeant, en protégeant les intérêts de notre pays, que l'Europe deviendra une puissance spatiale.
Or la chose est d'autant plus nécessaire que la France perd du terrain, comme le démontre la délocalisation en Allemagne de la production des moteurs d'Ariane 6. Pire, le sommet de Séville a acté une concurrence européenne débridée, au détriment de la logique de coopération interétatique promue par l'ESA. Nous avons mis des dizaines d'années à bâtir notre industrie, pour finalement accepter de la voir menacée.
Madame Rilhac, votre texte souligne à juste titre la nécessité de soutenir les acteurs européens et la nécessité d'imposer aux autres les mêmes exigences : c'est là une avancée que nous soutiendrons. Cependant, tout en partageant une partie de vos constats, nous ne pouvons, à moins d'ajustements, souscrire à votre proposition.
Vous souhaitez en effet que la Commission européenne propose un cadre juridique destiné aux entreprises européennes du spatial et que l'Union adhère à la place de ses membres aux traités concernant l'espace : pour notre souveraineté, le Rassemblement national ne peut, je le répète, vous soutenir. Nous promouvons, dans le domaine spatial, une coopération entre États membres, ce qui constitue précisément la raison d'être de l'ESA ; en revanche, nous refusons que la Commission prenne le pas sur ces États.