. Votre rapport indique que le cadre européen serait aujourd'hui le plus pertinent pour apprécier et corriger notre dépendance externe. Vous me donnez aucune explication à ce choix, qui entre en contradiction totale avec la définition de la souveraineté alimentaire figurant dans le rapport. Celle-ci est définie comme le droit dont dispose chaque pays de maintenir et de développer sa propre capacité de production et de produire son alimentation. Si la souveraineté alimentaire européenne est importante, elle est évidemment subordonnée à l'indispensable souveraineté nationale. Ce choix idéologique a des conséquences graves car la souveraineté alimentaire européenne pourrait être satisfaite sans l'agriculture française. Cela aggraverait au passage le déficit de la balance commerciale, qui ne se calcule pas au niveau européen, mais bien au niveau national.
Vous soulignez, dans votre rapport, que la souveraineté alimentaire de la France n'est pas menacée à ce jour sur la base de statistiques des Nations unies. Pourquoi aller chercher des chiffres si loin, et par ailleurs totalement fantaisiste au regard des chiffres du ministère de l'Agriculture ? Vous faites état d'une quasi-stagnation de la production française entre 2012 et 2021, alors que l'Agreste, organe statistique du ministère de l'Agriculture, indique que le nombre de têtes est passé d'un peu moins de 5 millions en 2012 à un peu moins de 4,3 millions en 2022. Cet effondrement concerne également d'autres secteurs. Un tiers des fruits et légumes, la moitié du poulet et le quart de la viande porcine sont importés en France, pour ne prendre que quelques exemples.
Contrairement à ce que vous dites, la souveraineté alimentaire française est bien menacée. Marc Fesneau, ministre de l'Agriculture, a lui-même donné un entretien le mois dernier à Valeurs actuelles, intitulé « Retrouver la souveraineté alimentaire » – ce qui sous-entend bien qu'elle a été perdue.
En matière environnementale, nous sommes en désaccord total avec votre présentation de la stratégie « Farm to Fork ». Il ne s'agit pas d'un outil de transition environnementale mais de décroissance agricole, contraire à la souveraineté alimentaire. Son étude d'impact envisage en effet une baisse de la production européenne de 11 %. Par ailleurs, la proposition de règlement sur l'utilisation durable des produits phytopharmaceutiques, dit SUR, a été retirée. Dès lors, pourquoi s'obstiner avec le plan Écophyto, qui en est sa déclinaison nationale ? Je rappelle que le Premier ministre s'est engagé à mettre fin aux surtranspositions alors que ce plan va précisément créer une distorsion de concurrence majeure. Le mot « surtransposition » est d'ailleurs absent de votre rapport, ce qui est problématique si l'on veut parler de souveraineté alimentaire.
Ce rapport, pur produit de l'idéologie macroniste, réalisé avec le soutien curieux de la France insoumise, est une vaste tromperie sur l'état actuel de notre souveraineté alimentaire et ne rend pas service à l'agriculture française.