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Intervention de Élise Descamps

Réunion du jeudi 8 février 2024 à 9h45
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Élise Descamps, secrétaire générale de l'Union syndicale des journalistes :

Nous constatons que la place des journalistes dans la société est de moins en moins comprise et nous ne nous sentons plus faire partie du paysage quotidien des citoyens, comme des personnes qui façonnent notre pays, notamment les élus. Nous manquons de temps pour bien travailler, nous manquons de sécurité. Nous avons besoin de travailler sans entrave, nous avons besoin que la liberté de la presse soit réaffirmée et d'être soutenus par nos employeurs et par les pouvoirs publics, mais nous nous voyons à l'inverse décrédibilisés par des élus ou des entreprises.

À titre illustratif, laissez-moi évoquer un exemple. Il y a quelque temps, le journal La Provence avait publié un article sur le contrôle de la chambre régionale des comptes concernant la commune d'Éguilles. En réaction, le maire a écrit à ses administrés pour leur tenir les propos suivants : « Il faut considérer que nous n'avons plus de presse informative et objective, seulement une presse partisane et politisée qui s'empresse de ronger un os dès qu'elle le peut, une presse qui n'aborde jamais le fond et qui a pour seul but de soulever des polémiques. Quel dommage. Aujourd'hui, être journaliste de presse locale, c'est trouver un titre-choc, posséder un bon appareil pour enregistrer, puis sortir quelques phrases hors contexte, et voilà, c'est écrit. Mais surtout, employer le conditionnel et faire jaillir le doute chez le lecteur. »

Je souhaite insister sur deux points : l'éducation aux médias et la précarité des journalistes. Les citoyens constituent pour nous la priorité et nous pensons que l'éducation aux médias doit vraiment représenter un volet important de l'action publique, qui doit y consacrer des moyens plus élevés. S'il faut apprendre à développer un esprit critique, il convient au préalable de donner le goût de l'information aux plus jeunes. Comment les citoyens peuvent-ils s'informer s'ils n'ouvrent jamais un journal, s'ils n'écoutent jamais une radio, s'ils ne suivent jamais un programme d'information à la télévision ? Pour y parvenir, il faut renforcer le pluralisme, payer des journalistes pour intervenir dans le cadre de l'éducation aux médias, non seulement pour témoigner de leurs pratiques, mais également de la démarche journalistique, de leurs doutes et dilemmes. Le journalisme n'est pas une science exacte, mais un véritable artisanat.

Ensuite, les journalistes sont victimes de la précarité. Aujourd'hui, un quart de la profession est pigiste ou enchaîne les CDD. Malheureusement, des groupes de presse font enchaîner à des dizaines de journalistes des CDD d'une journée. Pourtant, la loi Cressard de 1974 impose la présomption de salariat : tout journaliste doit être salarié. Nous demandons en premier lieu que cette loi soit respectée et que des moyens soient consacrés pour ce faire, qu'il s'agisse de contrôleurs Urssaf ou d'inspecteurs du travail. Des cellules doivent y être dédiées au sein du ministère du travail, mais aussi en interministériel, afin de combattre ces dérives. Enfin, nous avons besoin d'un statut pour les pigistes à l'étranger, qui ne sont pas protégés.

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