L'heure de la réparation a sonné et la reconnaissance symbolique par l'État de sa responsabilité à l'origine de ce scandale relève du niveau plancher de la décence.
C'est d'ailleurs pourquoi le vote de ce texte n'est qu'un premier pas, d'autres sont à venir. Il faudra légiférer pour reconnaître comme maladie professionnelle les cancers du sein et de l'utérus dont sont atteintes les ouvrières agricoles et assouplir les conditions de reconnaissance comme maladie professionnelle du cancer de la prostate dont souffrent nombre d'ouvriers agricoles. Il faudra prévoir, par une loi de programmation et une loi de finances, de dépolluer nos territoires, détoxiquer nos populations, réparer les préjudices corporels, environnementaux, moraux et économiques.
Il faudra créer un régime d'indemnisation dérogatoire au droit commun pour réparer lesdits préjudices, sur le modèle de ce qui a été fait pour les victimes de l'amiante. Il faudra créer une autorité administrative indépendante – c'est d'ailleurs l'objet d'une proposition de loi de mon excellent collègue Marcellin Nadeau.
Après tant de déceptions et de désillusions, d'incompréhension et de colère, comme celle qui a suivi l'inacceptable non-lieu prononcé le 2 janvier 2023, après les insuffisances des plans Chlordécone qui se sont succédé, présentés pourtant avec suffisance mais jamais à la hauteur de nos attentes légitimes, après tant de criantes discriminations dans le traitement des victimes du chlordécone et celles de l'amiante, il est temps que l'État, si prompt à concéder des dérogations sous la pression des lobbys, reconnaisse enfin sa responsabilité, ce qui ouvrirait droit à indemnisation.
Le colonialisme tend à exiger que les peuples colonisés se taisent et se satisfassent des miettes qui leur sont versées. Cette époque est révolue ! Nous ne nous tairons plus, forts de notre unité qui transcende les clivages politiques et territoriaux, et de l'extraordinaire mobilisation de nos peuples.