Intervention de Charlotte Parmentier-Lecocq

Séance en hémicycle du jeudi 29 février 2024 à 15h00
Responsabilité de l'État et indemnisation des victimes du chlordécone — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharlotte Parmentier-Lecocq :

Nous examinons aujourd'hui la proposition de loi de notre collègue Elie Califer visant à inscrire dans la loi la reconnaissance de la responsabilité de l'État vis-à-vis des victimes du chlordécone.

Je veux tout d'abord remercier M. le rapporteur d'avoir mis ce sujet à l'ordre du jour, car c'est un sujet majeur. L'usage du chlordécone a fait des ravages dans les Antilles. Il a entraîné une pollution durable des sols, des eaux et, par répercussion, a provoqué – et provoquera encore – de graves pathologies dont souffre la population antillaise.

De 1972 à 1993, l'État a laissé faire. Il a donc incontestablement une part de responsabilité dans cette situation ; il ne doit y avoir aucune ambiguïté là-dessus. Trente années plus tard, il était nécessaire de réparer ces préjudices, et c'est ce que nous avons collectivement commencé à faire depuis quelques années.

Une étape importante a été franchie en 2018, lorsque le Président de la République a reconnu officiellement la part de responsabilité de l'État. Il aura donc fallu attendre près de trente ans après l'arrêt de l'usage du chlordécone pour que l'État reconnaisse enfin sa part de responsabilité.

Monsieur le rapporteur, vous tenez à ce que cette reconnaissance soit gravée dans le marbre de la loi, afin d'en garantir la pérennité. Après nos débats en commission, le groupe Renaissance a décidé de vous suivre sur cette voie, sans toutefois occulter le fait que d'autres responsabilités ont été à l'œuvre. Cela a d'ailleurs été plusieurs fois souligné par les orateurs qui sont intervenus lors de la discussion générale, et c'est l'objet de l'amendement que je défendrai.

Il est vrai que cet acte symbolique, que nous pouvons soutenir collectivement, est important, mais il n'apporte pas de réponses nouvelles aux populations antillaises qui ont été touchées. Il est donc essentiel d'évoquer aussi le plan Chlordécone IV, qui a d'ailleurs fait l'objet d'une évolution budgétaire considérable – son budget est passé de 90 à 130 millions d'euros.

Je vous propose donc d'inscrire également dans la loi les engagements concrets que l'État doit continuer à prendre et qui font d'ailleurs l'objet de financements croissants et conséquents. Les enjeux sont nombreux : il faut renforcer la recherche et améliorer les connaissances scientifiques, afin de mesurer les incidences de l'usage du chlordécone et de remédier à ses effets défavorables sur l'environnement, la santé humaine et l'activité économique ; mener des actions visant à supprimer le risque d'exposition au chlordécone, notamment pour protéger la santé des populations en garantissant leur sécurité sanitaire et alimentaire ; et à terme, supprimer les risques liés à la pollution au chlordécone des terres et des milieux aquatiques.

Je vous propose également la création d'une instance indépendante chargée d'évaluer régulièrement l'atteinte de ces objectifs. Le groupe Renaissance approuve également votre volonté d'inscrire dans la loi l'objectif de poursuivre l'indemnisation des victimes, qui doit concentrer toute notre attention.

D'importantes avancées ont été menées depuis 2020, en particulier la reconnaissance de maladies professionnelles liées à l'exposition au chlordécone. Une telle possibilité est un progrès majeur pour les travailleurs exposés ainsi que pour leurs enfants. Cependant, monsieur le rapporteur, vous avez soulevé la difficulté à instruire les dossiers d'indemnisation, et c'est d'ailleurs pour y remédier que l'État a décidé de financer une association venant en appui aux victimes, afin de les accompagner concrètement dans la réalisation de leur dossier.

Outre les maladies professionnelles, nous devons poursuivre les études permettant d'identifier le lien entre l'exposition à la chlordécone et le fait de contracter certaines pathologies, donc ses conséquences pour la santé des personnes, afin d'ouvrir la voie à une indemnisation liée à ces situations spécifiques. À ce titre, la création d'un fonds dédié aux victimes du chlordécone serait une avancée, à la fois pour faciliter l'accès à l'indemnisation et pour en élargir la portée, au-delà des seules victimes de maladies professionnelles.

Monsieur le rapporteur, vous pouvez compter sur mon appui plein et entier pour atteindre cet objectif : avançons ensemble pour continuer d'apporter des réponses concrètes aux populations antillaises de la Guadeloupe et de la Martinique !

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