« Pendant plus de vingt ans, nos sols de Guadeloupe et de Martinique ont été sciemment empoisonnés – sciemment, car l'impact du chlordécone sur la santé humaine, tout comme sa rémanence, étaient connus des pouvoirs publics. Dès 1963, des données industrielles faisaient état de la toxicité du chlordécone ; elles ont été confirmées et complétées par l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis en 1976 et la production de chlordécone a été définitivement arrêtée la même année, après la contamination des ouvriers de l'usine de Hopewell. Pourtant, il aura fallu attendre le 3 juillet 1990 pour que le gouvernement français interdise enfin l'utilisation et la commercialisation du chlordécone. Néanmoins, MM. Louis Mermaz, ministre de l'agriculture et de la forêt, puis Jean-Pierre Soisson, son successeur, vont accorder aux producteurs de bananes une dérogation permettant de poursuivre l'empoisonnement des sols et des populations de Guadeloupe et de Martinique pendant trois années supplémentaires. Comment ne pas voir, ici, la collusion évidente entre l'État et les planteurs de bananes, au détriment de notre environnement et, plus encore, de la santé des Guadeloupéens et des Martiniquais ? Comment ne pas voir cette faute inexcusable ? Reconnaître cette responsabilité n'est que justice envers les Ultramarins et Ultramarines, ce dont notre République s'enorgueillira. Nous comptons sur vous. » Voilà la lettre que mes camarades écologistes de Guadeloupe et de Martinique m'ont demandé de vous communiquer.
La proposition de loi que nous examinons est fondamentale, parce qu'elle reconnaît la responsabilité de l'État dans le scandale du chlordécone – oui, le scandale. Cette responsabilité n'est pas exclusive, comme certains voudraient nous le faire dire, mais elle a été active.