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Intervention de Paul Christophe

Séance en hémicycle du jeudi 29 février 2024 à 9h00
Responsabilité de l'État et indemnisation des victimes du chlordécone — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Christophe :

Je tiens avant tout à saluer votre engagement constant pour la reconnaissance des victimes du chlordécone, monsieur le rapporteur. Je vous remercie d'avoir inscrit cette proposition de loi en troisième position de la journée d'initiative parlementaire du groupe Socialistes et apparentés. Vous connaissez les liens forts qui unissent le port de Dunkerque – situé dans ma circonscription – et les ports antillais, en partenariat avec l'Union des groupements de producteurs de bananes de Guadeloupe et Martinique.

Nos compatriotes antillais expriment des attentes fortes de réparation, non seulement de la part de l'État, mais également de la part de l'ensemble des parties prenantes. Ils attendent de nous des réponses concrètes : l'indemnisation des victimes, tout d'abord, mais aussi la dépollution des sols et des zones hautement contaminées. Quatre plans et feuilles de route se sont ainsi succédé depuis 2008 pour lutter contre les conséquences de l'exposition au chlordécone. Dès 2018, le Président de la République s'est rendu en Martinique et a affirmé que l'État prendrait sa part de responsabilité dans ce scandale environnemental et sanitaire, conséquence dramatique d'un choix collectif erroné.

La nouvelle stratégie pour 2021-2027, dotée d'un budget initial de 92 millions d'euros, vise plusieurs objectifs : protéger la santé des habitants, tendre vers le zéro chlordécone, prendre en charge les conséquences de cette exposition néfaste. M'étant vu confier, lors du dernier Printemps social de l'évaluation, l'élaboration d'un rapport sur le déploiement du fonds d'indemnisation des victimes de pesticides (FIVP) – créé à la suite d'une proposition de loi dont notre collègue Dominique Potier avait été le rapporteur –, et ayant pris part à la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, j'ai conscience du retard que nous accusons en matière de reconnaissance des victimes.

Pour rappel, le FIVP vise à simplifier les modalités de reconnaissance des pathologies liées à une exposition professionnelle à des pesticides faisant ou ayant fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché. Il a permis d'élargir le périmètre des personnes couvertes, de centraliser et d'homogénéiser l'instruction des demandes, et d'améliorer la réparation des non-salariés agricoles. Malgré un début difficile, ce fonds est de plus en plus connu des agriculteurs. Le nombre de victimes ayant obtenu une indemnisation est d'ailleurs en nette augmentation : il a triplé en trois ans, pour dépasser 1 000 dossiers en 2023. Quant au montant total des indemnisations versées, il a été multiplié par six en un an, atteignant 6,7 millions d'euros en 2022.

Malgré l'avis favorable accordé à certains dossiers déposés aux Antilles, malgré la reconnaissance du cancer de la prostate comme maladie professionnelle liée à l'exposition aux pesticides, et malgré les actions entreprises par le FIVP pour remédier aux difficultés rencontrées dans le déploiement du dispositif aux Antilles, celui-ci reste trop peu connu. Il reste beaucoup à accomplir, notamment pour amplifier et sécuriser le recours au fonds d'indemnisation des victimes des pesticides, renforcer la communication et lutter contre les fausses informations.

La responsabilité du scandale du chlordécone est le fruit d'une décision collective de l'État, des élus et des acteurs économiques face aux menaces qui pesaient sur une partie des exploitations et des emplois aux Antilles. Elle doit être appréciée dans sa globalité.

Depuis 2017, la majorité et le Gouvernement se sont mobilisés. Fruit d'un travail concerté avec les acteurs et les parlementaires, la trajectoire Chlordécone engagée en 2021 propose une réponse globale : protection, prévention, dépistage, réparation, analyse et aide financière. Le budget qui lui est alloué a été revu à la hausse, pour atteindre 130 millions d'euros, et l'effort dédié à la recherche a doublé – vous l'avez souligné, madame la ministre.

Si le groupe Horizons et apparentés partage la conviction que beaucoup reste à accomplir, il ne nous semble pas opportun de faire peser uniquement sur l'État la responsabilité de cette tragédie – la proposition de loi n'a d'ailleurs pas de portée normative. Nous espérons que l'examen du texte aboutira à une nouvelle rédaction, qui reconnaîtra l'ampleur des dommages causés dans les territoires, en complément des travaux menés depuis 2020, et qui gravera dans la loi les ambitions de la stratégie de lutte contre la pollution par le chlordécone. En conséquence, notre groupe pourrait voter en faveur du texte.

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