En octobre 2022, au titre de son droit de tirage annuel, le groupe Les Républicains a demandé la création d'une commission d'enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d'indépendance énergétique de la France. Rembobinons le film et rappelons-nous cette période.
L'hiver approche et les conséquences de la guerre déclenchée par la Russie contre l'Ukraine en février 2022 sont incertaines. La France, comme la plupart des États européens, est en grande partie dépendante du gaz russe et l'hiver rude qui est annoncé nous inquiète tous. Le Gouvernement, conscient de la crise énergétique en cours et de son possible impact sur les foyers français, engage un plan d'envergure pour éviter les coupures d'électricité. Le plan concerne également les industries, avec l'objectif de ne pas nuire à leur compétitivité. La ministre d'alors, Agnès Pannier-Runacher, mène de front des négociations avec les industriels et ses homologues européens, et lance une grande campagne de sensibilisation à la sobriété énergétique. Vous l'aurez compris, les mots d'ordre, en octobre 2022, étaient : responsabilité et anticipation.
C'est donc dans ce contexte difficile que les Républicains ont ajouté de l'anxiété, avec peut-être une certaine malice, en distillant l'idée que cette situation de dépendance énergétique était le fait du Président de la République et du Gouvernement. L'intitulé de la commission d'enquête était déjà plus que trompeur car en réalité, à moins de se référer à l'ère préindustrielle, la France n'a jamais été indépendante sur le plan énergétique. À rebours des idées reçues, le taux d'indépendance du pays tend d'ailleurs à augmenter, et non à diminuer : après une forte augmentation entre 1978 et 1995, suivie d'une stagnation jusqu'en 2010, il croît à nouveau régulièrement.
La notion de souveraineté énergétique est cependant intéressante, entendue comme la liberté de définir sa politique et de choisir ses options énergétiques, la réduction de nos dépendances et la résilience de notre système énergétique face aux crises. Sur ce sujet, notre excellent collègue Antoine Armand, en sa qualité de rapporteur de la commission d'enquête, a relevé les six principales erreurs commises en matière de politique énergétique au cours des dernières décennies, parmi lesquelles le fait d'opposer les énergies renouvelables électriques et le nucléaire, voire l'entretien du parc nucléaire lui-même.