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Intervention de Marc Fesneau

Réunion du mercredi 7 février 2024 à 17h30
Commission des affaires économiques

Marc Fesneau, ministre :

Personne ne compte sacrifier l'agriculture biologique, madame Chikirou. La question n'est pas là.

M. Lopez-Liguori m'a demandé comment imposer aux cantines scolaires d'avoir recours en priorité aux produits français. Si nous le faisions, je suis certain qu'il ferait partie de ceux qui diraient ensuite qu'il faut que l'État accorde des moyens pour permettre aux collectivités de respecter cette nouvelle obligation. Il va falloir choisir : soit la libre administration, soit la tutelle. On ne peut pas avoir les deux. On peut certes dire que l'on ne respecte pas les règles quand elles ne nous conviennent pas ; après tout, c'est une position qui peut s'assumer. On peut aussi choisir de sortir de l'Union européenne. Demandez aux Anglais ce qu'ils en pensent. Je ne crois pas qu'ils en aient tiré une position plus avantageuse…

Monsieur Pilato la souveraineté alimentaire signifie être capable de nourrir sa population ; mais c'est aussi le fait de savoir que, par sécurité, d'autres sont en mesure de nous nourrir en cas de mauvaise récolte. Prenez l'exemple des Espagnols : l'an passé, ils n'ont pas pu couvrir leurs besoins en céréales en raison de la sécheresse. Il faut donc être capable d'échanger avec d'autres acteurs, pour garantir notre souveraineté alimentaire et la leur. On ne peut s'en tenir à une logique d'autarcie. La souveraineté alimentaire ne saurait être réduite à l'autosuffisance, car en agriculture le rendement n'est jamais le résultat mécanique des facteurs de production. On peut avoir un rendement de 20 quintaux une année et de 80 l'autre, mais on ne peut jamais garantir qu'il sera de 50 quintaux. La réalité biologique fait que cela ne marche pas comme ça. Si vous croyez que vous pourrez toujours compter sur ce rendement de 50 quintaux, il est garanti sur facture que tôt ou tard vous subirez une famine – il suffit d'étudier l'histoire pour le savoir.

M. Martineau m'a interrogé au sujet de la lutte contre la francisation de produits et contre les fraudes. Il faut réaliser davantage de contrôles dans les grandes surfaces, mais aussi s'en prendre à certaines pratiques destinées manifestement à tromper le consommateur, notamment dans le domaine du vin.

M. Fournier m'a posé une question sur les aides au maintien. Je rappelle qu'elles ont été compensées par un crédit d'impôt d'un montant au moins équivalent et qu'il ne s'agit donc pas d'un débat d'ordre budgétaire. Beaucoup de chiffres ont été brandis par les uns ou par les autres, mais je rappelle que la difficulté principale de l'agriculture biologique réside dans la baisse de 1,5 milliard de son chiffre d'affaires au niveau national. Résoudre cette crise passe par une relance de la consommation, faute de quoi on ne se contentera que de réagir. Je répète qu'un travail est en cours avec les acteurs de la filière. C'est un élément important.

M. Perrot a eu raison de m'alerter sur la question de l'eau. Il faut procéder à des mesures de simplification, mais aussi tirer les conclusions du développement de l'arythmie climatique. Alors que les inondations se répètent dans le Pas-de-Calais, l'ancien Languedoc-Roussillon connaît une sécheresse depuis trois ans. La manière de gérer le cycle de l'eau doit donc être repensée. Cela ne veut pas dire qu'il faut tout miser sur les réserves d'eau, même si l'on en a besoin. Je rappelle que, dans l'Aude, les Pyrénées-Orientales et l'Hérault, les réserves sont à sec. Il faut donc travailler à un système résilient et capable de faire face à plusieurs années sans eau, avec des réserves mais aussi en s'inscrivant dans un cycle long.

Je souhaite rassurer M. Tavel : le MODEM ne fait pas partie de la majorité de Mme Christelle Morançais dans la région Pays de la Loire. Nous avions élaboré une autre liste – je m'occupe un peu des élections au sein de mon parti, donc je sais à qui nous avons donné notre investiture. En l'occurrence, c'est M. de Rugy qui était tête de liste dans cette région, et vous auriez pu en citer beaucoup d'autres où les objectifs fixés par la loi Egalim n'ont pas été atteints – y compris certaines régions où vous gouvernez en participant à la majorité. Il faut donc que nous fassions un effort collectif et c'est un choix politique me semble-t-il important.

Monsieur Barthès, vous ne pouvez pas faire des reproches aux Espagnols. Je suis d'accord avec M. Vojetta sur ce point. On entend des discours absolument toxiques vis-à-vis de l'Espagne. Pourtant, il a suffi que je téléphone à mon homologue espagnol pour qu'il accepte de déroger à sa réglementation nationale à propos de la MHE. Il aurait pu bloquer nos bovins à la frontière, et vous imaginez les dégâts que cela aurait provoqués dans la filière ; il ne l'a pas fait.

Il faut donc faire attention à ne pas jeter l'opprobre sur nos partenaires. Nous n'avons à n'en prendre qu'à nous-mêmes en matière de surtranspositions. C'est la raison pour laquelle nous travaillons pour les identifier, définir des mesures de simplification et peser sur la trajectoire européenne.

Ensuite, un certain nombre d'acteurs – dont certains, disons-le, sont français – profitent de la crise pour faire rentrer des vins d'Espagne. Nous allons nous pencher sur cela et procéder à des contrôles. Chacun doit prendre ses responsabilités. Je suis d'accord avec votre constat, mais n'allons pas dire que c'est la faute des Espagnols.

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