Intervention de Stéphane Guillot

Réunion du jeudi 1er février 2024 à 14h00
Commission d'enquête sur la gestion des risques naturels majeurs dans les territoires d'outre-mer

Stéphane Guillot, directeur-adjoint scientifique de l'Institut national des Sciences de l'Univers du CNRS, Domaine Terre Solide :

De manière générale, les impacts du changement climatique correspondent à une augmentation de la température globale du système Terre. Quels que soient les bassins, on constate une augmentation globale des océans Atlantique, Indien ou Pacifique à peu près au même niveau que la Terre, c'est-à-dire entre 1 et 1,5 degré. L'effet est toutefois plus important sur la terre que dans l'océan, ce dernier se réchauffant moins vite. Nous constatons également que cet effet d'augmentation se fait surtout ressentir la nuit, notamment à La Réunion et en Polynésie. Le nombre de nuits anormalement chaudes a en effet triplé lors de ces quarante dernières années. De plus, le réchauffement s'élève à un degré en journée et à deux degrés pendant la nuit.

Une des premières conséquences du réchauffement climatique correspond à l'augmentation du niveau de la mer, qui s'élève à 4 millimètres par an en moyenne. À nouveau, il existe des disparités : l'augmentation est plus rapide dans l'océan Indien, où l'élèvement atteint plutôt 6 millimètres par an, contre 3,5 à 4 millimètres par an au niveau de l'océan Atlantique.

Un des autres effets correspond à l'acidification des océans en raison de l'augmentation du CO2, ce qui entraîne des conséquences directes sur les mangroves et les coraux. De plus, ce phénomène a un impact sur les risques associés, car en cas de tempêtes et de cyclones, les protections naturelles, c'est-à-dire les barrières coralliennes et les mangroves, sont moins efficaces.

L'érosion des côtes représente un autre impact et se marque très fortement au niveau du bassin Caraïbes, qui compte de nombreuses plages. Ce phénomène est un peu moins prégnant à La Réunion, dont les plages sont moins nombreuses, même si la côte connaît tout de même cet effet d'érosion. En outre survient l'effet surcote : au moment des tempêtes ou des cyclones, les vagues sont plus importantes du fait de l'élévation du niveau de la mer et détruisent davantage les côtes.

Par ailleurs, nous commençons à constater une tendance vers la diminution des précipitations annuelles. Concrètement, la période de sécheresse devient plus intense et s'allonge, ce qui crée des problèmes de conservation d'eau. En effet, les îles n'ont pas de réservoir naturel et le système hydrologique est relativement peu développé. La saison des pluies devient également plus intense, mais de manière globale, les quantités d'eau annuelles diminuent de 10 à 15 %.

De plus, nous commençons à entrevoir une diminution du nombre des cyclones au niveau du bassin Caraïbes, mais également une augmentation de leur intensité. Dans l'océan Indien, la zone des cyclones se déplace vers le sud, ce qui impactera de plus en plus Mayotte et La Réunion, qui ne connaissaient pas beaucoup de cyclones jusqu'alors. Ce phénomène n'est pas encore concrètement constaté, car ce ne sont encore que des prévisions fournies par les modélisations réalisées au moyen des modèles globaux et des données locales. Je vous parlerai d'ailleurs de l'acquisition de celles-ci, car elles sont importantes pour la modélisation à l'échelle des îles. En effet, nous parvenons désormais à descendre à une échelle de 1,5 kilomètre, ce qui offre une relativement bonne connaissance de ce qui se passera autour des îles.

A priori, nous nous attendons à une diminution des vents, c'est-à-dire des alizées, au niveau du bassin Caraïbes ; cependant, ils devraient augmenter en intensité au niveau de l'océan Indien, en particulier pendant l'hiver austral, alors qu'ils étaient déjà relativement forts. Concrètement, l'anticyclone des Mascareignes, qui est au large de Madagascar, deviendra plus important et intense, ce qui favorisera les vents locaux.

Le constat n'est donc pas encourageant et nous nous attendons à une augmentation des risques climatiques de manière assez prégnante au niveau des îles. Ces risques sont en effet très exacerbés sur les îles et les phénomènes connus en outre-mer seront beaucoup plus forts dans les trente à cinquante ans à venir.

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