L'objectif de cette proposition de loi est louable : la taxe qu'elle prévoit d'instaurer participerait au financement du Centre national de la musique, une structure créée en 2020 ayant prouvé son efficacité pendant la crise du covid. Toutefois, nous ne pensons pas qu'une taxe supplémentaire sur les plateformes de streaming constitue une solution pérenne.
Ces plateformes sont déjà soumises à plusieurs taxes : la TVA à 20 %, la taxe sur les services numériques à 3 % et la TSV à 5 %. La nouvelle taxe pénalisera les deux acteurs qui participent le plus au financement de la création musicale française, Deezer et Spotify, des entreprises européennes qui reversent déjà 70 % de leurs revenus aux auteurs, artistes, éditeurs et producteurs. Deezer, la plateforme française, en sera même la principale victime, alors qu'elle doit faire face à la rude concurrence de nouveaux entrants comme TikTok, qui happent les audiences sans rémunérer de manière juste les ayants droit. Deezer et Spotify risquent d'arrêter d'investir en France. Au mieux, elles gèleront leurs effectifs ; au pire, elles les réduiront. Si elles ne parviennent pas à absorber cette taxe, elles pourraient aussi augmenter le prix des abonnements pour les utilisateurs finaux. Pour rappel, Deezer a enregistré 50 millions d'euros de pertes en 2022.
À l'inverse, les géants mondialisés comme Meta, TikTok et Google, dont la musique ne représente qu'une partie de l'activité et qui ne financent nullement la création, seront très peu affectés. Il n'est pas certain non plus que, forts de leurs armées de juristes, ils payeront réellement cette taxe – de la même façon que, huit ans après sa création, nous ne sommes pas certains qu'ils s'acquittent de la TVS. Pour toutes ces raisons, les Républicains ont prévu de ne pas voter en faveur de cette proposition de loi.