Depuis quelques mois, nous avons effectivement l'impression qu'une nouvelle étape a été franchie dans l'explosion de la violence à l'égard des élus locaux. Ce sentiment est notamment dû au fait que, le lundi 3 juillet, au moment des émeutes qui ont vu se multiplier les agressions à l'encontre des élus ou de leur famille, l'AMF a appelé à un rassemblement républicain. Les élus du Rassemblement National y ont bien évidemment participé, pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, par solidarité avec les victimes. Ensuite, pour alerter le Gouvernement, qui reste relativement passif face à ce fléau et qui s'est donné bonne conscience en annonçant un petit plan de 5 millions d'euros. Enfin, par amitié avec nos collègues élus ou militants du Rassemblement National, agressés de trop nombreuses fois en exerçant leur mission ou en contribuant à l'expression démocratique de notre pays. Et cela, dans l'indifférence générale, voire coupable, de l'immense majorité des élus non RN. Permettez-moi d'adresser un soutien amical à Muriel Di Rezze, conseillère régionale Grand Est, aux collaborateurs du groupe RN au conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca), à Albin Freychet, conseiller régional de Nouvelle-Aquitaine, ou encore à notre collaborateur, Pierre Lecamus.
Aux agressions s'ajoutent de très nombreuses informations qui auraient dû, depuis bien longtemps, alerter le Gouvernement et aboutir à l'adoption, en urgence, d'un texte visant à protéger les élus, leurs familles, les candidats aux élections et les anciens élus. J'en veux pour preuve le rapport sénatorial de 2019 de Philippe Bas selon lequel, sur les 3 812 élus participant à son enquête, 92 % avaient déjà subi des incivilités, injures, menaces ou agressions physiques. Je fais aussi référence à l'enquête publiée en mars 2021 par l'Association des maires d'Île-de-France intitulée « Violences contre les élus locaux » qui montrait qu'à la suite de la promulgation de la loi « engagement et proximité » de 2019, qui avait pourtant annoncé un renforcement de la protection fonctionnelle des élus locaux, seulement 6 % d'entre eux estimaient cette protection suffisante.
Par ailleurs, comment ne pas évoquer les très nombreux ouvrages publiés en 2020 par des maires qui exprimaient leur désarroi et leur sentiment d'abandon au quotidien ? En outre, les chiffres du ministère de l'intérieur sont alarmants : en 2023, 2 300 atteintes aux élus ont été enregistrées, soit une hausse de 15 % par rapport à 2022. Cette situation d'ensauvagement n'épargne absolument pas les communes rurales : dans mon département de Gironde, des élus d'Yvrac ou de Rions ont été victimes d'agression. Enfin, l'AMF déplore la démission d'environ quarante maires par mois, soit dix de plus que lors de la mandature 2014-2020. Toujours en Gironde, plus d'une vingtaine d'élections partielles ont déjà été organisées depuis le début du mandat, après de multiples démissions.
Face à cette situation dramatique, il est normal que deux tiers des Français indiquent qu'ils pourraient renoncer à se présenter à une élection en raison d'une crainte pour leur sécurité ou celle de leur famille, tout comme l'on peut comprendre que 55 % des maires actuels, selon l'AMF, envisagent de ne pas se représenter en 2026. Ces chiffres risquent incontestablement d'affaiblir encore davantage notre République, qui avait vu 106 communes sans candidats aux municipales en 2020, contre 62 en 2014. Enfin, 64 % des citoyens estiment que la sécurité des élus locaux n'est pas assurée.
Il était donc plus qu'urgent de se réveiller ! Cette proposition de loi, bien qu'insuffisante, va dans le bon sens. En effet, elle satisfera les 81 % de Français favorables au renforcement des sanctions pénales pour les auteurs de violences faites aux élus, et même les 57 % des sympathisants de La France insoumise qui se disent favorables aux mesures de protection des élus. Ceux-ci seront sûrement déçus de voir que leurs parlementaires sont profondément déconnectés des réalités, capables de multiplier les amendements visant à alléger les sanctions, fustigeant une surenchère pénale imaginaire et alimentant ainsi le laxisme judiciaire, moteur de l'ensauvagement de notre société.