Mes chers collègues, je regrette la faiblesse des outils législatifs mis à notre disposition. Cette proposition de loi, assise sur des objectifs d'emploi et d'insertion, manque malheureusement d'ambition – elle n'octroiera aucuns moyens supplémentaires aux associations. Pire, du fait de l'inscription des logiques du secteur marchand au sein des associations et de la raréfaction des subventions, dans une recherche permanente de réduction des coûts, la commercialisation du monde associatif nous guette, ce qui entraîne une limitation des libertés associatives et citoyennes.
Pensez-vous sincèrement qu'améliorer l'accès au compte d'engagement citoyen changera le quotidien des 16 millions de bénévoles en France, alors que ce dernier ne finance que 826 dossiers dans leur totalité et 22 400 dossiers partiellement – avec un reste à charge pour les bénévoles ? Alléger l'accès au congé d'engagement associatif quand ce dernier reste suspendu au bon vouloir des employeurs est bien inutile. Je l'ai d'ailleurs vécu personnellement : en tant que responsable associatif, j'ai vu la difficulté des parents d'élèves engagés à faire valoir auprès de leurs employeurs leur droit à s'absenter pour siéger dans les organismes collégiaux du ministère de l'éducation nationale.
Vous souhaitez également ouvrir aux communes la possibilité d'accorder aux associations une exonération de la taxe d'habitation pour les locaux qu'elles occupent, mais vous ne précisez pas à quelles associations cela s'appliquerait et surtout, en l'absence de contrôle et de tout critère objectif, vous prenez le risque de voir se développer des logiques clientélistes.
Le « RSE washing » permettra aux entreprises de se substituer au Gouvernement et aux élus locaux et de choisir ainsi d'aider les associations sympas qui répondent à leurs champs d'intérêt : autant vous dire que Greenpeace et Anticor pourront toujours attendre le soutien de Total ou du groupe LVMH.
Le monde associatif – nous le savons tous ici – aurait préféré qu'un débat soit ouvert sur la pérennité des financements des emplois et des projets et que de réels engagements soient pris dans la durée ; qu'un statut de bénévole leur apporte une reconnaissance et de réels moyens pour mener à bien leurs engagements – sans que leurs choix leur soient imposés par leur employeur ; et que soit établi un vrai plan de formation pour les salariés, mais aussi pour les bénévoles, incluant des aides réelles pour valoriser les acquis de l'expérience.
Voilà une belle occasion manquée. Ces millions de bénévoles, qui sont nos lanceurs d'alerte au quotidien et avec qui nous dialoguons chaque jour tous autant que nous sommes dans nos circonscriptions, méritaient mieux que cette proposition de loi. Néanmoins, elle a le mérite de traiter de sujets importants pour le Mouvement associatif. C'est la raison pour laquelle, dans une démarche constructive, nous ne nous y opposerons pas.