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Intervention de Aude Luquet

Réunion du mardi 23 janvier 2024 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAude Luquet :

Quelque 3 500 personnes ont perdu la vie cette année sur nos routes et plus de 16 000 y ont été gravement blessées. Derrière ces chiffres, il y a des destins et des familles brisés à jamais, parce que l'un des leurs se trouvait au mauvais endroit, au mauvais moment. Ce mauvais moment, c'est celui qui vous fait croiser la route d'un chauffard au détour d'un virage ou d'un feu rouge, c'est celui qui vous fait basculer dans l'horreur. Vous n'y êtes pour rien : lui seul en est responsable.

Alcool, stupéfiants, vitesse sont les trois principales causes des accidents mortels de la route. C'est bien ce triptyque qui forme un cocktail mortel et constitue un fléau contre lequel il nous faut redoubler d'efforts, en faisant preuve d'une volonté sans faille. D'abord dans la réponse pénale, que nous attendons ferme et dissuasive. Mais aussi dans la prévention, car, lorsque l'on parle de sanction, c'est qu'il est déjà trop tard. Agir en amont est la principale des protections contre les comportements à risque. Nous devons renforcer, encore et toujours, l'éducation routière dès le plus jeune âge et tout au long de la vie.

Bien sûr, lorsque la sensibilisation ne suffit pas, il faut frapper fort par la sanction. En cas d'homicide involontaire, la peine moyenne est de vingt-deux mois de prison ferme pour le conducteur fautif. Si l'on s'en tient aux statistiques judiciaires, en 2021, plus de huit personnes sur dix reconnues coupables de blessures involontaires après avoir pris le volant sous l'empire de l'alcool ou de stupéfiants ont été condamnées à une peine principale d'emprisonnement. Mais il s'agissait de prison ferme pour seulement 64 % d'entre eux.

Ne doit-on pas en déduire que c'est à la justice de se montrer plus ferme et non au législateur d'aggraver les peines, puisque les peines maximales déjà en vigueur ne sont pas prononcées ?

Nous attendons aussi que la justice se saisisse davantage des peines complémentaires prévues, comme l'a préconisé le garde des sceaux dans une récente circulaire.

Sur le fond, cette proposition consiste à remplacer le terme « homicide involontaire commis par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur » par le terme « homicide routier ». Si nous comprenons la volonté de répondre à la douleur causée aux proches des victimes par la qualification du drame qu'ils ont vécu en homicide involontaire, nous demeurons lucides quant au fait que, du point de vue du droit pur, il ne s'agira toujours que d'une mort causée par autrui sans intention de la donner.

Toutefois, ne nous y trompons pas, c'est bien un comportement volontaire qui a pour conséquence ces drames de la route. Le changement sémantique proposé souligne cet état de fait et, en ce sens, il est bienvenu.

Ne soyons cependant pas dupes, ce n'est pas en substituant un mot à un autre que nous réparerons mieux les drames routiers. Au-delà d'un tel changement, les victimes et leurs proches attendent surtout d'être mieux considérés, entendus et accompagnés.

Cette proposition de loi, que notre groupe votera, est un pas supplémentaire pour les victimes, mais d'autres dispositions devront être prises pour aller plus loin, plus fort encore dans la lutte contre les comportements meurtriers au volant.

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