En 2023, quatre-vingt-quatorze femmes ont été tuées. Cela représente une baisse de 20 % par rapport à 2022, année qui avait enregistré une hausse de 15 %. Chaque année, nous faisons un bilan, mais derrière les chiffres, ce sont des vies perdues et bouleversées. Nous ne pouvons pas nous en satisfaire.
La réponse judiciaire pour protéger les victimes d'un partenaire ou ancien partenaire violent qu'est l'ordonnance de protection est loin d'être parfaite, nous le savons. Certes, le nombre de demandes approuvées a augmenté de 129 % entre 2015 et 2021 mais on part de très bas. 3 852 demandes ont été acceptées en 2021 : ce chiffre est dérisoire lorsqu'il est mis en regard du nombre de personnes qui se sont déclarées victimes de violences par un partenaire ou ex-partenaire – plus de 208 000.
Nous sommes tous d'accord pour admettre que le dispositif doit être amélioré. C'était l'objet de ma proposition de loi qui avait été adoptée à l'unanimité par notre assemblée le 9 février 2023.
La mesure, qui visait à porter de six à douze mois la durée maximale des mesures, est reprise dans votre texte. Six mois, c'est très court pour organiser une séparation. L'allongement du délai permet aussi de faciliter le travail du juge.
Afin de favoriser la délivrance de l'ordonnance de protection, la proposition de loi prévoyait également – nous y tenons – la suppression du critère de danger dans l'appréciation du JAF afin que celle-ci porte uniquement sur l'existence de violences vraisemblables. Selon le Comité national de l'ordonnance de protection, le critère de danger rend plus complexe la décision du juge ; elle le conduit à établir une hiérarchie dans les violences en distinguant celles qui sont source de danger et celles qui ne le sont pas, ce qui s'apparente à une mission impossible. Nous devons vraiment travailler en vue de la séance sur ce point très important qui donnera tout son sens à votre texte.
Je rappelle que cette disposition avait été adoptée à l'unanimité après avoir été ajustée avec la Chancellerie. Pourquoi ne pourrions-nous pas la reprendre ? C'était un signal important adressé aux magistrats pour leur enjoindre de se préoccuper des violences uniquement. L'ordonnance de protection est un outil de prévention, pas une sanction. Le juge ne se prononce pas sur une culpabilité mais sur un risque potentiel. J'espère que vous apporterez votre soutien à nos amendements, comme vous l'aviez fait il y a tout juste un an.
Si l'ordonnance provisoire de protection immédiate semble être un outil pragmatique, je m'interroge néanmoins sur la capacité des JAF, qui sont déjà surchargés, à traiter les demandes. Ils sont d'ailleurs très inquiets ; les procureurs le sont aussi mais ils paraissent davantage en mesure de répondre.