En 2022, 244 000 victimes de violences conjugales ont été enregistrées par les forces de l'ordre. Au cours des dernières années, de nombreuses mesures ont été adoptées pour lutter contre ce fléau, parmi lesquelles le bracelet antirapprochement, l'ordonnance de protection ou encore le téléphone grave danger.
L'ordonnance de protection apparaît comme un outil essentiel de lutte contre les violences conjugales, désormais bien connu du grand public et maîtrisé par les professionnels du droit. Elle est plébiscitée par les associations de défense des femmes victimes de violences qui y voient un dispositif rapide et efficace.
Entre 2017 et 2021, le nombre d'ordonnances délivrées a augmenté de 153 %. Néanmoins, ces résultats encourageants ne doivent pas nous démobiliser car, en comparaison de nos voisins, l'Espagne notamment, ce nombre reste insuffisant. La durée, le délai d'obtention et les conditions de prolongation peuvent être améliorés. C'est tout l'objet de la proposition de loi d'Émilie Chandler dont je salue l'engagement en faveur de cette noble cause.
L'article 1er prévoit de porter la durée initiale des mesures prononcées de six à douze mois. L'article 515-12 du code civil limite la durée à six mois à compter de la notification de l'ordonnance ; celle-ci peut être prolongée « si, durant ce délai, une demande en divorce ou en séparation de corps a été déposée ou si le juge aux affaires familiales a été saisi d'une demande relative à l'exercice de l'autorité parentale. »
En allongeant la durée, le législateur accorde plus de temps aux victimes pour réorganiser leur vie et ouvre le bénéfice de l'ordonnance de protection aux victimes non mariées ou sans enfant.
Par ailleurs, l'article 1er crée l'ordonnance provisoire de protection immédiate, nouvel outil à la main du procureur pour protéger dans un délai de vingt-quatre heures une personne en danger sous réserve de son accord. Cette ordonnance n'est pas conçue comme une alternative à l'ordonnance de protection. Elle a vocation à protéger provisoirement la victime pendant un délai maximal de six jours entre l'audience et la décision du JAF lorsqu'il existe un risque sérieux pour la victime de se trouver en situation de vulnérabilité face à son conjoint.
L'article 2 introduit dans le code pénal une nouvelle infraction pour non-respect de l'ordonnance provisoire de protection immédiate. L'article 3 concerne l'application des dispositions en outre-mer.
Le ministère de la justice a recensé 94 féminicides en 2023. Ce chiffre marque une baisse encourageante de 20 % par rapport à 2022 mais il ne masque pas les problèmes de société structurels que posent les violences conjugales. Chaque féminicide est un meurtre de trop.
La proposition de loi dote la justice de nouveaux outils utiles pour les femmes et parfois les hommes, victimes de violences. S'il propose quelques ajustements par voie d'amendement, le groupe Renaissance la votera, résolument et avec enthousiasme.