Intervention de Christian Kert

Réunion du jeudi 18 janvier 2024 à 14h00
Commission d'enquête sur l'attribution, le contenu et le contrôle des autorisations de services de télévision à caractère national sur la télévision numérique terrestre

Christian Kert, président du comité d'éthique du groupe Canal+ :

La création des comités d'éthique remonte à la loi de 2016. Le débat, en abordant les questions d'indépendance et de liberté d'expression, avait été très porteur pour l'audiovisuel.

Vous avez bien voulu rappeler qui nous sommes, monsieur le président ; permettez-moi de compléter en disant que, à l'origine, nous ne nous connaissions pas. Vous avez noté la grande diversité de ce comité : nous sommes tous des passionnés des médias – l'un d'entre nous étant même un professionnel – qui se sont retrouvés sur cette thématique de l'éthique, de la morale, de la déontologie.

Nous avons été désignés pour un mandat de trois ans par le comité de surveillance du groupe Canal+ selon des critères qu'il ne nous appartient pas de définir. Nous avons l'absence d'humilité de penser que c'est peut-être grâce à certaines de nos qualités – la direction de Canal+, que vous recevrez probablement, pourra vous éclairer sur ce point. Nous ressentons une certaine fierté de nous occuper d'éthique, de morale, de déontologie. Nous sommes totalement indépendants, c'est-à-dire que nous ne recevons aucune rémunération en contrepartie des quelques heures que nous consacrons à cette mission. Seuls les frais de transport nous sont remboursés. Pour le reste, nous n'avons pas de moyens et c'est tout à fait heureux si nous voulons rester indépendants.

Nous travaillons en équipe, ce qui est extrêmement important. Nous sommes connectés entre nous et avons bien sûr des contacts avec la direction de Canal+. Loin de nous contenter des deux ou trois réunions annuelles prévues, nous faisons en sorte d'entretenir un contact quasi permanent et nous tenons plusieurs réunions en visioconférence afin d'élargir notre réflexion. En effet, si nous nous en tenions à la seule mais importante préoccupation de veiller à l'éthique, nous ne serions pas débordés par le travail. Nous cherchons donc à servir de boîte à idées, même si cela va au-delà de ce que la loi nous demande. Ainsi, c'est sur notre proposition que l'Arcom a retenu le principe d'une conférence bisannuelle de tous les comités d'éthique. Nous y voyons la possibilité d'élargir notre réflexion et d'aller vers une meilleure harmonisation de nos travaux respectifs, par exemple en ce qui concerne les différentes chartes de déontologie des groupes audiovisuels.

Nous travaillons sur saisine de l'Arcom ou du groupe, ainsi que sur autosaisine, comme la loi nous le permet – notre comité a exercé cette prérogative dès 2019. Il en a été ainsi récemment lors de l'affaire opposant l'animateur Cyril Hanouna à votre collègue parlementaire Louis Boyard. Nous travaillons en groupe de façon à élargir la réflexion de la seule entité juridique qui nous a installés.

Je ne m'attarderai pas sur notre mission, qui est de veiller à l'éthique, c'est-à-dire à l'ensemble des concepts de la morale du groupe. Cette définition est peut-être un peu vague mais l'éthique est notre préoccupation principale. Nous avons tout de même d'autres obligations, dont celle de rendre compte de nos travaux. C'est le but du rapport annuel, que nous essayons d'enrichir avec diverses réflexions d'actualité sur l'audiovisuel, de façon à nous faire entendre aussi bien de l'Arcom que du groupe Canal+, sachant que nous ne voulons être les supplétifs ni de l'un ni de l'autre, notre indépendance étant absolument nécessaire.

À côté des saisines et de l'autosaisine, nous menons plusieurs chantiers. Ainsi, sous les directives de notre collègue Richard Michel, nous allons lancer au sein du groupe Canal+ une rencontre avec tous les métiers du groupe. L'objectif est de savoir comment tout fonctionne de façon à ne pas être surpris lorsque quelque chose dans une émission choque ou interpelle.

Nous souhaitons par ailleurs vous expliquer comment nous envisageons l'avenir de ces comités d'éthique et ce qui fait défaut dans la loi du 14 novembre 2016 visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias qui, comme toute œuvre humaine, est perfectible. Si le débat législatif avait porté sur les modalités de désignation de leurs membres – soit par le groupe, soit par l'autorité prédécesseure de l'Arcom, cette dernière option ayant toutefois été repoussée – ainsi que sur les garanties d'indépendance au sein des groupes, il n'avait pas permis de donner une véritable identité aux comités d'éthique. Lorsque nous rencontrons des journalistes, nous nous rendons compte qu'ils sont incapables de définir notre mission. Il convient donc de rendre la loi plus lisible sur ce point afin de mieux situer le travail des comités d'éthique placés entre leurs groupes d'attache et l'Arcom.

La deuxième préoccupation que nous nous permettons d'exprimer est celle des moyens. Par rapport à l'Arcom, nous n'avons aucun moyen. Nous n'avons pas de secrétariat, pas de locaux, etc. On peut comprendre que la loi n'ait pas prévu cela mais si l'on décide que les comités d'éthique doivent accroître leurs compétences et leur périmètre d'activité, il faudra sans doute songer à leur donner quelques moyens supplémentaires, sans bien entendu que cela remette en cause leur indépendance, à laquelle nous tenons beaucoup.

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