La violence routière concerne chacun de nous, viscéralement, intrinsèquement, dans notre chair et notre histoire personnelle. Elle plonge nos familles dans le deuil et, dans une injustice absolue, ôte chaque année la vie à 3 550 Français qui se trouvaient au mauvais endroit au mauvais moment. C'est Lucie qui, fauchée par un chauffard, nous quitte le jour du solstice d'hiver 1996 et qui, enterrée le 24 décembre, réunit sa famille autour de son esprit à chaque Noël depuis près de trente ans.
Dans un accident mortel sur cinq, le conducteur responsable de la collision est positif aux stupéfiants. Environ 30 % des accidents sont causés par l'alcool. L'alcool, les stupéfiants et la vitesse représentent les trois principales causes d'accidents mortels sur nos routes. Le point commun est que, dans les trois cas, le conducteur n'est plus en mesure d'évaluer correctement les dangers. Au-delà des statistiques, derrière chaque accident de la route se trouvent des familles dévastées, des rêves anéantis, des vies fauchées. Combien de familles continueront à être brisées par ces drames ?
C'est par le droit que la justice prend tout son sens, pour les victimes comme pour les personnes jugées. Créer le délit d'homicide routier envoie un message clair : la vie humaine prime, celles des femmes et des hommes, jeunes ou moins jeunes. Ceux qui mettent délibérément en danger la vie d'autrui doivent en assumer les conséquences. La responsabilité doit remplacer le mépris dont témoignent les drogués qui conduisent sans respect des règles et des valeurs de la République. Toute personne titulaire d'un permis de conduire doit être consciente des interdictions et de sa responsabilité.
Pour les familles touchées par ces tragédies, l'expression « homicide involontaire » est insupportable, injuste et injustifiée. Les drames et la douleur des familles nous obligent. En tant que législateur, notre devoir est d'améliorer notre droit et d'apporter des réponses à ceux qui nous ont fait confiance. La sécurité sur la route doit être une évidence.
Ce texte, en requalifiant l'infraction d'homicide involontaire en homicide routier, offre de la reconnaissance aux familles des victimes et une meilleure perception judiciaire de l'inconscience du comportement de l'auteur de l'infraction. Créer le délit d'homicide routier, c'est reconnaître la gravité de comportements qui entraînent des morts qui auraient pu être évitées. Nous devons ériger une barrière légale ferme pour dissuader la commission d'actes irresponsables aux conséquences dévastatrices. Tuer au volant après avoir délibérément consommé de l'alcool ou des stupéfiants ou après avoir violé la loi, c'est transformer son véhicule en arme par destination.
Face à de tels agissements, ne restons plus indifférents. Gardons à l'esprit l'objectif ultime de prévenir ces tragédies, de protéger les Français et de faire en sorte que chacun puisse rentrer chez lui sain et sauf. La mesure prévue par ce texte doit être complétée par des efforts accrus en matière de prévention et de sensibilisation. Avec la création de trois infractions caractérisées dès la première circonstance aggravante et de peines complémentaires prononçables à l'encontre des auteurs d'infractions routières, nous apportons une réponse pénale concrète et sévère à la hauteur de la situation.
Ce texte a également une valeur dissuasive en avertissant les conducteurs sur les dangers de la conduite irresponsable. Ne laissons aucune place à la complaisance. Continuons le réarmement de notre arsenal pénal, en élargissant les peines à la disposition du juge, en protégeant mieux les victimes et en respectant leurs familles.