À l'heure où notre pays vit de fortes tensions et où un sentiment d'abandon, notamment dans les territoires ruraux, est clairement exprimé, les acteurs de la médiation sociale donnent au quotidien leur énergie pour construire un monde plus humain ; ce faisant, ils renforcent le lien social indispensable à la cohésion nationale.
Pourtant, alors que l'aspect humain de leur mission est central et qu'ils ont été fortement sollicités, notamment lors de la crise du covid, les conditions de travail, la reconnaissance sociale et la rémunération dont ils bénéficient ne sont pas à la hauteur de leur rôle pourtant indispensable. Alors qu'ils se sont pleinement intégrés à tous les secteurs, ils peinent à être reconnus à leur juste valeur pour leur travail du quotidien.
L'instauration d'une norme Afnor, en 2021, afin d'identifier les structures des métiers de l'action sociale, apparaît à ce titre insuffisante. Les alertes à propos de leur déficit d'attractivité se sont intensifiées. Le malaise est grandissant, et les professionnels concernés ne cessent d'exprimer leur inquiétude profonde quant au sens de leur engagement.
Face à la précarité, à l'éloignement des services publics, à l'isolement et même à la fracture numérique, le Parlement doit se saisir de ce défi majeur qu'est le délitement du lien social, d'autant plus dans le contexte actuel de virage domiciliaire, de vieillissement croissant de notre population et de complexité de toute démarche administrative.
Le rapport publié par le Credoc – Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie – en 2021 montre que 31 % de la population française déclarait se sentir en situation de vulnérabilité en 2020, soit une augmentation de 10 points par rapport à 2018. Les 12 000 médiateurs sociaux qui exercent aujourd'hui en dehors de tout cadre législatif jouent un rôle central dans l'aller vers et dans l'accompagnement des personnes les plus éloignées des institutions, et ce dans tous les secteurs comme le logement, les transports, l'éducation, la tranquillité publique, l'intervention sociale et les services à la population.
Il est nécessaire d'organiser efficacement cette profession par secteurs, afin de lui donner toute la visibilité nécessaire à son action. Elle doit pouvoir s'appuyer sur tous les acteurs publics existants, en coordination avec l'ensemble des structures œuvrant en la matière.
À ce titre, le choix de l'échelon départemental, déjà compétent en matière d'action sociale, va dans le bon sens.
Néanmoins, les départements ne pourront agir dans ce domaine que si on leur donne les moyens nécessaires à l'extension de leur compétence. Dans le cas contraire, le risque serait que ce texte se révèle inefficace ou qu'il ne permette pas d'aboutir à une réelle amélioration des conditions de travail des acteurs de la médiation sociale.
Toutes les collectivités locales doivent être associées et les départements doivent pouvoir définir eux-mêmes les modalités de leur action, en participant activement à la détermination des zones d'intervention, lesquelles ne sauraient être déterminées à l'échelle nationale, sur la base des classifications liées à la politique de la ville. Il faut ici appliquer le principe de subsidiarité et laisser aux collectivités locales la possibilité d'apprécier elles-mêmes les besoins, en fonction des spécificités de chaque territoire.
Par ailleurs, les professionnels de la médiation sociale demandent eux-mêmes une meilleure organisation et une formation de plus grande qualité, ce qui supposera d'intégrer tous les acteurs publics, mais également d'adapter l'offre de formation dans les écoles et les universités. J'ajoute que leur rôle dans le domaine de la santé – en matière de prévention comme d'accès au soin – doit être pensé à la hauteur des enjeux, notamment dans les territoires ruraux, où la rareté des professionnels des secteurs médical et médico-social est encore plus prégnante.
Le groupe Les Républicains est convaincu que le fait de donner un véritable statut à ces acteurs et d'améliorer leur formation permettra aux citoyens de mieux les identifier et d'y faire plus facilement appel. Nous constatons tous, localement, que plus la précarité est grande – qu'elle soit liée à des considérations financières, à l'isolement ou à l'âge –, plus l'accès effectif aux droits et aux services publics est difficile. La dématérialisation des services publics et le vieillissement de la population créent une fracture numérique de nature à limiter le recours aux aides sociales dont nos concitoyens pourraient bénéficier. L'identification des médiateurs sociaux par la population est ainsi une réponse solide au problème du non-recours aux droits.
Je conclurai en soulignant que prendre soin des autres doit devenir une priorité nationale. Voilà ce qu'il faudrait mettre en avant dans une grande campagne de communication. Il y a également, me semble-t-il, un enjeu à montrer le quotidien des médiateurs sociaux : ils seront ainsi plus visibles et plus accessibles aux publics qui en ont besoin. Il est aussi nécessaire de les former, pour qu'ils montent en compétence et puissent ainsi répondre aux multiples attentes.
Il faut enfin, cela a été dit, replacer l'humain au cœur de ces métiers. Ces personnels doivent pouvoir passer du temps auprès des personnes qu'ils accompagnent, pour les écouter, pour être dans l'empathie, pour établir un climat de confiance. Or, dans de très nombreux cas, ils en ont de moins en moins.